L’Assemblée refuse la réhabilitation collective des fusillés de 14-18
29/05/2016
Une nouvelle loi proposée par les députés Front de gauche, après l’encadrement des salaires des patrons, a été rejetée jeudi. Alors que vont débuter les commémorations du centenaire de la bataille de Verdun, l’Assemblée a refusé de réhabiliter de manière collective les fusillés pour l’exemple de 14-18.
A la demande du secrétaire d'Etat chargé des Anciens combattants, Jean-Jacques Todeschini, la majorité du groupe PS, les radicaux de gauche, les élus de droite et du centre ont voté un amendement supprimant l'article unique du texte. Défendue par le groupe front de gauche et par son président le député André Chassaigne, cette loi avait pour but de « de porter une exigence de justice à l’égard de tous ces « civils déracinés » dont parlait Henri Barbusse, sous l’uniforme desquels on reconnaissait le laboureur et l’ouvrier, et qui furent condamnés à mort, le plus souvent de manière expéditive par des conseils de guerre spéciaux ou parfois de simples officiers, pour refus d'obéissance, abandon de poste ou désertion à l'ennemi… »
650 fusillés pour l’exemple pour des faits de désobéissance étaient concernés, et non les soldats condamnés pour crimes de droit commun et espionnage.
C’est le député Jean-Jacques Candelier qui portait la loi. Dans son adresse à l’Assemblée, il expliquait : « Le Parlement n’a pas pour mission de juger, et ce n’est pas la prétention de la présente proposition de loi. Aujourd’hui, il est simplement question de s’interroger sur la place que la Nation souhaite réellement accorder à ces soldats au sein de sa mémoire. En déposant une proposition de loi visant à procéder à une réhabilitation des « fusillés pour l’exemple » de la Première Guerre mondiale, les députés du groupe GDR poursuivent modestement le combat entamé dès les premiers mois de la Grande guerre par certains de nos illustres prédécesseurs, comme les députés Jean Parvy, Louis Andrieux, Jean-Baptiste Giray, Aristide Jobert ou Paul Meunier, qui s’exclamait à la tribune en 1916 : « Il faut en finir, Messieurs, avec les crimes des conseils de guerre ».
C’est pour cette raison qu’il lui faut aujourd’hui procéder à une réhabilitation collective et générale des fusillés et demander pardon à leurs descendants de les avoir oubliés, stigmatisés, et rejetés, alors même que dans l’ensemble, ceux-ci ont pour la plupart combattu, brandissant leurs baïonnettes face à l’artillerie pour défendre la patrie. C’est à ce prix que la nation cessera d’être hantée par Alphonse, Octave, Louis, Eugène, Paul, Emile, Lucien et les autres. C’est à ce prix que nous pourrons rendre justice à ceux ayant connu l’épreuve tragique de l’épée qui se baisse, du bruit fracassant des douze coups de fusil et du bruit mat des balles qui pénètrent dans les corps, du coup de grâce dans la tempe, de la parade devant le corps. »
Mais pour le secrétaire d'Etat aux Anciens combattants, "le moment n'est pas venu" pour une réhabilitation générale. Jean-Jacques Todeschini a rappelé que le Premier ministre Lionel Jospin avait rendu en 1998 un hommage inédit aux "fusillés pour l'exemple" et que dix ans plus tard, le président Nicolas Sarkozy avait fait de même à la mémoire de tous les soldats de la Première Guerre mondiale, sans exception.
Le secrétaire d'Etat a également rappelé l'annonce faite en 2013 par François Hollande de la création d'un espace consacré aux fusillés au Musée de l'Armée aux Invalides, ainsi que la numérisation et la mise en ligne sur le site "Mémoire des Hommes" des dossiers des conseils de guerre. Ces mesures sont effectives depuis le 11 novembre 2014.
Jean-Jacques Candelier. « Ce n’était pas infâmant de reculer de quelques dizaines de mètres, surpris par une attaque, pour mieux repartir au combat. Ce n’était pas infâmant de ne pas sortir de sa tranchée, quand devant vos yeux s’amoncellent les corps de vos camarades tombés par vagues lors d’absurdes attaques. Ce n’était pas infâmant de ne parler que corse ou breton et de ne pas être en mesure d’expliquer sa blessure. Pourtant, nombre de soldats français sont morts sous les balles de leurs camarades pour de tels faits. Les histoires du soldat Lucien Bersot, exécuté pour ne pas avoir voulu porter le pantalon tâché de sang d’un camarade mort au combat, ou du sous-lieutenant Chapelant, fusillé attaché à son brancard, sont les plus connues. »
Durant la Grande Guerre, 7,8 millions de Français ont été mobilisés. Au total, 1,3 million d'hommes ont été tués, laissant 700.000 orphelins et 600.000 veuves.
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