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29/03/2014

Exposition. Jean Jaurès, une vie d’humanité

jean-luc mélenchon, exposition, jean jaurès, archives nationales, aurélie filippetti, gilles candar, romain ducoulombier, magali lacousse,Inaugurée 
le 4 mars dernier (1), l’importante exposition «Jaurès», proposée jusqu’au 2 juin aux Archives nationales, hôtel 
de Soubise à Paris (2), donne le coup d’envoi des commémorations du centenaire 
de l’assassinat 
de l’homme politique français, fondateur 
et directeur 
de l’Humanité.

«JAURÈS ASSASSINÉ ». Le titre en lettres capitales barre les cinq colonnes à la Une de l’Humanité du 1er août 1914. C’est «le choc» après l’assassinat du grand dirigeant socialiste, combattant de la paix jusqu’à y mettre ses dernières forces.

L’exposition débute par une évocation visuelle et sonore sous la forme panoramique, à 360 degrés, d’une projection d’images des derniers jours de sa vie et de la dernière semaine avant le déclenchement du premier conflit mondial. L’animation s’arrête lorsque les premiers défilés de poilus apparaissent telle une ombre sur le grand écran de l’actualité, celle annonçant la mort brutale de l’homme politique et journaliste français, attablé au café du Croissant, à deux pas du siège du journal qu’il a fondé et dirige depuis dix ans, et celle laissant présager l’hécatombe de millions d’hommes et de femmes.

Comme le confirme Romain Ducoulombier, l’un des trois commissaires de l’exposition, « le choc de l’assassinat de Jaurès reste dans la mémoire collective » si fortement que les concepteurs de l’exposition ont souhaité que les visiteurs se trouvent immédiatement plongés au cœur de cette tragédie. On découvre alors la table sur laquelle Jaurès chuta, assassiné ce 31 juillet 1914, à 21 h 40, d’un tir en pleine tête par ce « trouble » Raoul Villain. Des obsèques de Jaurès à l’ordre de mobilisation générale, la France plonge en quelques jours dans le tourbillon guerrier de « l’union sacrée ». Face à cette destruction meurtrière, la vie et l’humain doivent reprendre leurs droits. Pour Jaurès, « quel que soit l’être de chair et de sang qui vient à la vie, s’il a figure d’homme, il porte en lui le droit humain ».

C’est d’ailleurs cette humanité que l’exposition proposée par la Fondation Jean-Jaurès et les Archives nationales retrace au travers de l’existence du député du Tarn. Jaurès : une vie pour l’humanité est le titre du catalogue de cette importante exposition. Son humanité entoure directement le visiteur : ses derniers habits sont ainsi présentés.

Des portraits, des photos, des manuscrits. Ou encore son testament, un document des plus intimes, jamais présenté au public, écrit à l’orée de ses cinquante ans. « En exposant non seulement des archives, mais aussi certains de ses objets, nous avons voulu insister sur l’homme », confirme Magali Lacousse, conservatrice en chef du patrimoine aux Archives nationales, commissaire de l’exposition. Il n’y a plus qu’à suivre alors le couloir qui arpente la vie « des humanités à l’Humanité » de Jaurès. L’humanité qu’il déploie dans son premier éditorial, « Notre but », du journal éponyme ; l’humanité encore dont il fait preuve « sur le terrain », en tant qu’élu, aux côtés des mineurs de Carmaux, de « sa » France, de la classe ouvrière et de la paysannerie, des esprits des Lumières, des arts et de la littérature. L’humanité qui le conduit à avancer une conception rassembleuse d’un socialisme basé sur la justice, la fraternité, la démocratie et la paix.

Né le 3 septembre 1859, à Castres (Tarn), Jaurès est issu d’une famille bourgeoise appauvrie. Brillant, studieux et travailleur, le jeune homme, « paysan cultivé », incarne tout ce que signifie alors la « méritocratie républicaine ». Reçu premier au concours de l’École normale supérieure, il devient agrégé de philosophie.
D’abord professeur de philosophie au lycée d’Albi, le jeune républicain fait son entrée au Palais Bourbon en 1885, devenant le plus jeune député de France. Battu en 1889, il retrouve un siège en 1893, en devenant député socialiste de Carmaux, ville minière du Tarn. Convaincu de l’importance de la presse, il écrit très tôt des articles dans plusieurs journaux, notamment la Petite République ou encore la Dépêche, de Toulouse, où il publiera un billet éditorial durant de longues années. En 1904, il décide de fonder son propre journal.

Il pense à l’appeler la Lumière puis XXe siècle, avant de choisir l’Humanité. Grâce au concours du musée d’Histoire vivante de Montreuil, on peut découvrir son bureau au journal, alors situé rue Montmartre, et son encrier en forme d’oiseau. Et puis, deuxième centre de gravité de cette exposition, sans doute la plus étoffée jamais présentée, « la France de Jaurès » prend la forme d’un hémicycle. Toutes les facettes de l’action de l’homme politique y apparaissent. À l’Assemblée, Jaurès, regard clair et barbe fournie, est un tribun remarquable. Un film en témoigne. Aucun son de sa voix n’a malheureusement été conservé. Les images animées de sa gestuelle et des réactions de ses collègues semblent attester de son éloquence. On le voit encore filmé à Berlin en novembre 1912, lors d’un voyage et meeting contre la guerre. Car c’est un « homme de terrain », qui n’hésite pas à se rendre aux côtés des gens, pas seulement pour les rencontrer mais aussi pour être acteur, apporter des éléments de compréhension et intervenir.

En France, il accompagne les luttes sociales très dures face à un patronat brutal. Il prend position en faveur du capitaine Albert Dreyfus. Ouvert sur le monde, il se rend en Amérique latine, etc. Dirigeant politique, il obtient l’unification du socialisme français autour du concept d’« évolution révolutionnaire », qu’il reprend de Marx : le 17 octobre 1908, après huit heures de discours, il parvient à faire adopter la motion proposée par sa fédération du Tarn au congrès de Toulouse de la SFIO. Un moment historique, matérialisé par la présentation du document inédit, jamais présenté dans une exposition publique, racheté il y a peu par les archives départementales du Tarn. Il s’agit du manuscrit « largement raturé, ce qui est rare chez Jaurès, preuve que le texte a été collectivement amendé », précise Gilles Candar, troisième commissaire de l’exposition et président de la Société d’études jaurésiennes. Après être passé devant le buste sculpté par Gabriel Pech, on accède à la dernière salle « épilogue », toute petite, chapelle toujours ardente. Jaurès au Panthéon. Résonne alors la voix de Brel :  Pourquoi ont-ils tué Jaurès ?


(1) Étaient notamment présents Jean-Marc Ayrault, premier ministre, Aurélie Filippetti, ministre de la Culture et de la Communication, Jean-Luc Mélenchon, coprésident du Parti 
de gauche, etc. L’Humanité était représentée par son secrétaire général, Silvère Magnon, Patrick Le Hyaric était excusé.

(2) Au 60, rue des Francs-Bourgeois à Paris 3e (Métro Rambuteau). Jusqu’au 2 juin, du lundi au vendredi de 10 heures à 17 h 30, samedi et dimanche de 14 h 30 à 17 h 30, fermée
 le mardi et les jours fériés. Entrée : 6 euros.

Illustrations : documents de l'exposition Jaurès aux Archives nationales

Documents à télécharger : Le livret de l'exposition -

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Pierre Chaillan

08/04/2013

COUP DE BALAI : RAPPEL HISTORIQUE !

coup de balai, 	pcf, pierre laurent, jean-luc mélenchon, eva Joly, andré chassaigne, 5 mai pour une VIè République, L’emploi par Jean-Luc Mélenchon de l’expression « coup de balai » fait débat à gauche. C’est une expression qui a pourtant été couramment employée contre la droite, mais qui est, quand elle est appliquée aux socialistes, jugée par certains radicale et manquant de fond.

"L'idée du coup de balai n'est pour moi ni la bonne expression, ni la bonne orientation" disait ce weekend Pierre Laurent. Critique renouvelée avec plus de vigueur encore ce lundi matin par André Chassaigne. Gênés aux entournures par la dureté du ton du co-président du PG, le PCF préfère parler du fond. "Le message que nous devons envoyer est un message de fond sur le programme du gouvernement et pas quelque chose qui peut être mal interprété".

Pourtant le « coup de balai » est une expression couramment employée à gauche. Un lecteur attentif, Claude Testanière, qui nous propose quelques exemples. Le 18 Fructidor (4 septembre) 1797, le directoire estime qu’un «coup de balai» est indispensable contre royalistes. Auguste Blanqui a lui-même utilisé cette expression dans son journal Le Père Peinard, fondé en 1880 : « Lorsque viendra par conséquent le grand coup de balai ? ». Claude Testanière défend ici l’usage de l’expression « coup de balai » comme intervention populaire pour demander la révocation d’élus.
De manière plus encore plus évidente, il y a ces deux affiches. Celle, célèbre, de l’artiste russe Victor Déni en 1920 représentant Vladimir Illitch Lénine balayant le monde des banquiers et des rois. Ou encore celle datée de 1932, où la SFIO (Section Française de l’Internationale Ouvrière) réclamait à son tour un « coup de balai ».

Du balai à la VIè République

« Du balai ! Place au Peuple ! Passons à la 6e République ! Voilà quelques uns de nos slogans. Plus personne ne peut nier que nous sommes désormais en pleine crise de régime d’une ampleur sans précédent » écrit Alexis Corbière, du PG, sur son blog. L’appel à la VIème République restera peut-être plus fédérateur. C’est en tous cas plutôt à ce mot d’ordre qu’Eva Joly et des militants écologistes se joindront à la marche du 5 mai.
Moins étonnant, le ministre Benoît Hamon condamne aussi l’emploi du terme : "La gauche doit être collective (...) appeler à une manifestation coup de balai contre la gauche, ça rompt avec toutes les traditions, toute l'histoire de la gauche".

L'Humanite.fr avec Claude Testanière