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12/01/2014

Faisons aujourd’hui entrer les résistantes au Panthéon!

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À qui la patrie reconnaissante? Par Frédérick Genevée, historien.

"La décision présidentielle d’une ou de nouvelles panthéonisations est éminente. Elle devrait à mon sens reposer sur quelques principes. D’abord, dans la manière de décider. Si une consultation a été engagée, il me semblerait plus démocratique que cela soit le Parlement qui en décide et non un seul homme – fût-il élu au suffrage universel direct. Il faudrait aussi, non seulement en finir avec la masculinité caricaturale de cette institution, que l’on trouve non seulement inscrite dans sa devise « Aux grands hommes, la patrie reconnaissante », mais surtout dans sa composition.

Combien d’ouvriers au Panthéon?

Il me semble donc qu’il faudrait, cette fois-ci, faire entrer de nombreuses femmes au Panthéon. Pas une, pour se donner bonne conscience, mais plusieurs. Il n’est pas tolérable que seules deux femmes y reposent aujourd’hui, dont l’une parce qu’elle est la «femme de ».

Il est aussi nécessaire d’être attentif à la diversité sociale. Combien d’ouvriers au Panthéon? Aucun. Combien de personnalités issues de l’immigration ? Trop peu. Le Panthéon ne peut trouver ou retrouver sa fonction démocratique qu’en étant à l’image de ce que fut et est la société française.

Résistance

Si l’on accepte le principe de la panthéonisation et de l’érection d’un temple républicain, il faut y faire entrer celles et ceux qui ont servi la République et qui ont défendu ses principes démocratiques et d’égalité. Toutes les cultures et sensibilités politiques qui ont concouru à la défense de notre liberté doivent y être représentées, cela exclut évidemment les personnalités qui ont porté dans l’histoire de France des discours de haine, de racisme et d’antisémitisme, donc de l’extrême droite.

Il est enfin une période –outre celle de la Révolution française– qui peut incarner facilement, aux yeux de tous et notamment des plus jeunes, ce que furent le pire et le meilleur de la France, c’est évidemment celle de la Seconde Guerre mondiale. Et le meilleur, c’est la Résistance.

Il en découle qu’il faut faire entrer les résistantes au Panthéon ! Sans entrer en opposition avec d’autres propositions nombreuses et légitimes, plusieurs noms de personnalités circulent qui ont retenu mon attention parce qu’elles sont à la fois différentes mais ont en commun la Résistance, la déportation et une vie d’engagement. Je pense à Germaine Tillion, résistante, déportée à Ravensbrück, grande intellectuelle engagée contre la torture pendant la guerre d’Algérie. Je pense à Geneviève de Gaulle-Anthonioz, résistante, déportée à Ravensbrück, qui consacra ensuite une grande partie de sa vie, à la tête d’ATD-Quart Monde, à la lutte contre la pauvreté.

D’autres femmes, d’autres résistantes ont partagé avec elles l’enfer de Ravensbrück. Je voudrais ici montrer en quoi leur parcours mérite le Panthéon. Marie-Claude Vaillant-Couturier, jeune photographe engagée, a fait en 1933 les premiers reportages clandestins sur les camps de concentration nazis d’Oranienburg et de Dachau ; résistante, elle est déportée à Auschwitz, puis à Ravensbrück. Elle est ensuite la seule femme à témoigner au procès de Nuremberg ; élue députée communiste, elle s’engage pour la défense de nombreuses causes et est notamment la première, en 1964, à prendre, à l’Assemblée, la défense de Mandela et de ses compagnons condamnés par le régime de l’apartheid.

Emancipation

Enfin, Martha Desrumaux, ouvrière textile: elle s’engage très tôt dans le syndicalisme et au Parti communiste, dont elle devient une des dirigeantes ; résistante, elle fut aussi déportée à Ravensbrück. Sa présence comblerait l’absence totale des ouvriers parmi ceux qui sont honorés au Panthéon.

À elles quatre, elles incarnent la diversité des engagements et la lutte pour l’émancipation des femmes. Elles méritent d’être honorées et d’être montrées en exemple en ces temps où la bête immonde surgit à nouveau.

Frédérick Genevée, l'Humanité

02/01/2014

Républicain espagnol et communiste, Virgilio Peña a cent ans aujourd'hui...

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Chronique de Jean Ortiz. Humble ouvrier agricole andalou, Virgilio est devenu un "héros" malgré lui, une "estrella" (une star) dit-il en pouffant de rire, grâce à son épopée et au documentaire Rouge miroir (Dominique Gautier et Jean Ortiz). La télé publique andalouse l'a programmé à plusieurs reprises. Le centenaire a une allure, un humour, une verve, une mémoire de jeune homme. Et des idéaux intacts."Toute ma vie j'ai été communiste. Et j'en suis fier."

Virgilio est né le deux janvier 1914, d'un père ouvrier agricole et d'une mère vendeuse de "churros", dans un village emblématique de la province de Cordoba: "Espejo" (en français: "miroir", cela ne s'invente pas), village à la blancheur rebelle, inondé d'oliviers et dominé par le château de la duchesse.
Son père, autodidacte, l'appela Virgile, du nom du poète latin qu'il lisait le soir, couché sur la paille. Lors du soulèvement paysan de 1918, la garde civile le tabassera jusqu'à le laisser "estropié". Il en mourra. Les reîtres bruleront ses livres (Virgile, Hugo...) sur la place du village.
Très jeune, Virgilio Peña (en espagnol, la "peña", c'est le rocher, cela ne s'invente pas non plus) adhère à la Jeunesse communiste, qui prône "la revolucion social".

Lorsque le 14 avril 1931 est proclamée en Espagne la République, le jeune ouvrier agricole ("jornalero") hisse le drapeau républicain au balcon municipal, "paseo de las Calleras". La République puis le Front populaire améliorent la vie, les conditions, jusque là esclaves, de travail des millions de "sans terre de l'époque". Même si la réforme agraire reste timide...Timide mais insupportable pour les grands propriétaires, les "caciques", l'oligarchie, l'Eglise, l'armée, la banque...

Lorsque le coup de force fascisant (le 18 juillet 1936) ensanglante le pays, le milicien Virgilio participe à la défense de son village andalou, puis rejoint le "bataillon Garcés". Il est aux premières lignes des combats acharnés de Pozoblanco, Villa del Rio, Lopera... L'intervention massive de Hitler et Mussolini, et l'hostilité antirépublicaine des gouvernements anglais et français, vinrent à bout de l'armée populaire.
La suite est connue. Internement honteux dans les camps, appelés "de concentration", du gouvernement Daladier et de la Troisième République: Barcarès et Saint-Cyprien.

En vidéo : un extrait de Rouge miroir de Dominique Gautier et Jean Ortiz

Envoyé à Bordeaux, Virgilio trime dans les vignobles puis à la construction de la "base sous-marine" allemande. Dès le début de 1942, il fait partie des premiers groupes de résistants. Le 19 mars 1943, il est arrêté et torturé par la police française puis livré aux nazis, qui le déportent en septembre 1943 à Buchenwald (matricule 40843), triangle rouge des "terroristes". Dans cet enfer, il organise la résistance du petit groupe d'Espagnols, et partage le même Block que Jorge Semprun. "Le 11 avril 1945, je suis né pour la deuxième fois. La résistance intérieure libère le camp, avant l'arrivée des Américains". Il en sort, la peau sur les os, en juin 1945, et rejoint Pau où il continue le combat antifranquiste avec ces camarades espagnols et français.

A cent ans, le jeune communiste Virgilio ne manque aucune manif, toujours un bon mot de "chispa" andalouse aux lèvres. Il y a des hommes "imprescindibles" (indispensables).

Publié par l'Humanité

07/06/2013

MARCEL PAUL ENFANT ET MINISTRE COMMUNISTE DE LA REPUBLIQUE

paul2.jpgENFANT DE LA REPUBLIQUE

Enfant trouvé le 12 juillet 1900 dans le XIVe arrondissement de Paris où il avait été abandonné, il commence à travailler à l'âge de 13 ans comme valet de ferme dans la Sarthe. Il milite à 15 ans dans les Jeunes Socialistes, contre la guerre.

Mobilisé dans la marine, il participe à la révolte des équipages de Brest, puis à celle des marins qui refusent de faire fonctionner la centrale électrique de Saint-Nazaire contre les ouvriers en grève.

À sa démobilisation, il s'installe tout d'abord à Saint-Quentin, dans l'Aisne, où il travaille dans le bâtiment et commence à exercer une activité syndicale. Il est ensuite embauché comme électricien à la Société des transports en commun de la région parisienne. En 1923, il adhère au parti communiste.

De 1931 à 1936, il occupe le poste de secrétaire général de la Fédération des services publics, hospitaliers, éclairage et force motrice (CGTU). Il est nommé ensuite secrétaire général adjoint, puis secrétaire général (en 1937) de la Fédération réunifiée de l'éclairage1. En 1932, il est violemment agressé à la sortie d'une réunion syndicale du personnel soignant de l'Hôtel-Dieu de Marseille. Une infirmière qui l'accompagne, Edmée Dijoud, est tuée. Devenu proche de Maurice Thorez, il est présenté par le PCF aux élections municipales de 1935 dans le XIVe arrondissement de Paris, où il est élu, ainsi que Léon Mauvais.

En 1938, il se rend en Espagne et en Tchécoslovaquie au nom de la CGT.

En 1939, il est mobilisé dans l'infanterie, car la marine refuse son incorporation. Après la signature du pacte germano-soviétique, il est exclu, ainsi que les autres communistes, de la direction de la Fédération de l'éclairage (Clément Delsol le remplace à la tête de la fédération dite « légale »). Fait prisonnier, il s'évade deux fois.

Il rejoint la Bretagne, où il occupe avec Auguste Havez la fonction de responsable inter-régional. Il s'occupe alors de ramasser des armes et des explosifs pour constituer des dépôts, puis, sur ordre de la direction du parti, revient à Paris en novembre 1940 tout en suivant les actions dans l'ouest jusqu'en janvier 1941. Très actif dans le milieu de l'éclairage et des services publics, il s'investit dans la mise sur pied de comités populaires dans la région parisienne.

Investi également dans l'Organisation spéciale, il apprend, à partir de juillet 1941, le maniement des explosifs avec France Bloch-Sérazin et organise en août 1941,un attentat manqué contre un train officiel allemand2.

Dénoncé, il est arrêté en novembre 1941. Détenu au commissariat, puis à l'hôpital de Saint-Denis où il tente de se suicider, il est ensuite transféré à la prison de la Santé. Jugé en février 1943 par la section spéciale, il est condamné à quatre ans de prison.

À l'été 1943, il est transféré, avec d'autres détenus, à la centrale de Fontevrault. Livré en février 1944 aux Allemands, Marcel Paul tente une nouvelle fois de s'évader. Il est déporté le 27 avril 1944 à Auschwitz, où un matricule lui est tatoué. Le 14 mai, il est transféré à Buchenwald avec les hommes de son convoi.

Dans le camp, il devient l'un des chefs de la Résistance clandestine, au sein du « comité des intérêts français ». Il devient l'un des cinq membres du bureau et peut décider de l'affectation des détenus aux postes de travail. Il sauve ainsi de nombreux déportés français, dont Marcel Dassault.

Rapatrié en priorité avec des personnalités, il reste peu de temps à Paris et repart pour Buchenwald pour s'occuper du retour des autres déportés.

De retour à Paris, Marcel Paul entre au Comité central du PCF, élu lors du Xe congrès de juin 1945. Il reprend ses activités syndicales et est nommé membre de l'Assemblée consultative, où il intervient le 3 août en faveur de la nationalisation du gaz et de l'électricité.

MINISTRE DE LA REPUBLIQUE

paul.jpgDéputé de la Haute Vienne de l‘Assemblée constituante, il est nommé ministre de la production industrielle le 21 novembre 1945, dans le gouvernement de Charles de Gaulle, succédant à Robert Lacoste, il reste à ce poste dans les gouvernements de Félix Gouin et de Georges Bidault, jusqu'en décembre 1946. Le 2 décembre 1945, il vote la nationalisation de la Banque de France et des organismes de crédit.

Le 27 mars 1946, il propose la nationalisation de l'énergie et organise la création d'EDF-GDF, qui est votée le 8 avril 19463. Il fait de la nouvelle entreprise publique une forteresse syndicale en organisant le statut du personnel. En tant que ministre de la Production industrielle, il dépose, le 15 janvier, un projet de loi relatif au personnel des exploitations minières et assimilées, plusieurs projets sur les élections aux Chambres de métiers et, le 20 avril, un projet portant réglementation des conditions d'accès à la profession de coiffeur. Le 19 avril 1946, il vote pour l'adoption de la Constitution et le 24 avril pour la nationalisation des sociétés d'assurance.

En novembre 1946, il est élu à l'Assemblée nationale et nommé membre de la Commission de production industrielle. Il quitte le ministère en décembre 1946. Après un mois d'un gouvernement socialiste homogène, les ministres communistes sont rappelés en janvier 1947, mais pas Marcel Paul. À partir de janvier 1947, Marcel Paul reprend la tête de la fédération CGT de l'éclairage, fonction qu'il occupera jusqu'en 1966, de fait jusqu'en 1963.

En mai 1947, le gouvernement socialiste de Paul Ramadier écarte les ministres communistes. En février 1947, il devient président du Conseil central des œuvres sociales (CCOS) d'EDF-GDF, où il reste jusqu'à la dissolution de l'organisation par le gouvernement de René Pleven, le 17 février 1951. Le lendemain, la police envahit les locaux du CCOS, 22 rue de Calais, Paris 9e, et en chasse le personnel4.

MILITANT SYNDICAL

paul1.jpgVoulant se consacrer plus totalement à sa mission syndicale, il démissionne de son mandat de député le 20 avril 1948. Il n'est pas candidat aux élections de 1951. En 1952, il fonde avec le colonel Manhès la Fédération nationale des déportés et internés résistants et patriotes (FNDIRP), dont il est président jusqu'à sa mort.

En 1964, il n'est pas réélu au Comité central du Parti communiste, à la suite de divergences concernant la reprise des œuvres sociales d'EDF-GDF qu'il avait créées. Depuis 1951, la gestion en est devenue patronale et le gouvernement met comme condition à la reprise de l'activité par les syndicats l'éviction de Marcel Paul, ce que la direction fédérale se résout à accepter en 1962.

Il est nommé officier de la Légion d'honneur5 en avril 1982. À l'issue de la cérémonie du 11 novembre 1982, place de l'Étoile à Paris, il est pris d'un malaise fatal. Il meurt chez lui quelques heures plus tard.

 

Source Wikipédia