12/11/2023
LA PASONARIA
L’Espagnole Dolorès Ibárruri (1895-1989), surnommée “La Pasionaria”, est née en bas de l’échelle sociale dans une bourgade minière proche de Bilbao. Elle est pourtant devenue une héroïne de la guerre civile espagnole, députée des Asturies. C’est au printemps 1918 que cette fervente défenseuse de la République signe pour la première fois un article dans la presse ouvrière, avec ce pseudonyme étincelant: “La Pasionaria”. Si l’expression désigne aujourd’hui dans le dictionnaire “toute femme passionnée par une cause et capable de galvaniser les foules par son éloquences”, c’est grâce à elle. Retour sur la vie mouvementée d’une femme combative et passionnée.
Huitième de onze enfants, Dolores Ibárruri nait le 9 décembre 1895 dans la bourgade minière de Gallarta, proche de Bilbao. Sa mère, Juliana Gómez Pardo, est d’ascendance castillane ; son père, Antonio Ibárruri, est un mineur basque. Antonio est catholique et militant carliste.
Encouragée par son institutrice, Dolores rêve de devenir enseignante et dévore les livres qu’on lui prête. Mais ses parents n’ont pas les moyens de payer ses études et la jeune fille doit abandonner son rêve à l’âge de quinze ans. Elle se lance dans l’apprentissage de la couture avant de devenir femme de ménage.
La Pasionaria
Dolores Ibárruri rencontre Julián Ruiz, un mineur et militant socialiste, qu’elle épouse en 1916 ; ils auront six enfants, dont des triplés. Seuls deux atteindront l’âge adulte.L’année suivante, le couple participe au mouvement de grève générale de 1917, et Julián est arrêté et emprisonné. Il le sera encore à plusieurs reprises dans les années 1920 ; entre ses périodes d’emprisonnement, la mort de plusieurs de leurs enfants en bas âge et une situation financière compliquée, les conditions de vie de la famille Ibárruri Gómez sont particulièrement difficiles.
Julián introduit dans les milieux militants son épouse, qui partage ses idéaux socialistes. Dolores lit de nombreux auteurs, parmi lesquels Karl Marx, forme sa pensée politique et milite au sein de la Fédération des Jeunesses socialistes. En 1917, la révolution russe l’enthousiasme et marque un tournant dans son engagement. En 1918, Dolores écrit un premier article dans la presse ouvrière, dans le journal El Minero Vizcaino ; l’article paraissant la Semaine sainte et portant en particulier sur l’hypocrisie religieuse, elle le signe du pseudonyme La Pasionaria.
Mundo Obrero
En 1919, elle se rapproche de l’Internationale communiste avant de participer à la fondation du Parti communiste espagnol (PCE). Elle devient membre du comité provincial de Biscaye, au sein duquel elle joue un rôle important. Après dix ans de militantisme, elle est élue au Comité central du PCE en 1930. L’année suivante, à la demande du parti, Dolores Ibárruri déménage à Madrid et quitte son mari ; bien que séparés, ils garderont des liens d’amitié.
A Madrid, Dolores devient responsable du journal du parti, Mundo Obrero (monde ouvrier). Remarquée pour ses articles dans El Minero Vizcaino puis Mundo Obrero, elle est étroitement surveillée et arrêtée pour la première fois en septembre 1931. En prison, Dolores persuade ses co-détenues d’entamer une grève de la faim pour protester contre leurs conditions de détention. Emprisonnée à nouveau en mars 1932, elle fait chanter l’Internationale à ses co-détenues et les encourage à refuser les emplois mal payés en prison.
Mujeres Antifascistas
En 1933, Dolores Ibárruri fonde Mujeres Antifascistas, une association de femmes contre le fascisme et la guerre. La même année, le PCE l’envoie comme déléguée à Moscou et ce voyage la marque profondément. En 1934, après la violent répression de la révolution asturienne, le comité Mujeres Antifascistas se transforme en protection des enfants d’ouvriers devenus orphelins. Dolores prend de gros risques pour faire passer clandestinement les enfants vers Madrid.
Les activités militantes de Dolores ne lui permettent plus de s’occuper correctement de ses deux enfants encore en vie, Rubén et Amaya, ni de leur assurer une existence stable. Elle prend alors la décision de les éloigner et de les envoyer vivre en Union soviétique.
¡No Pasarán!
En 1936, lorsque le Front Populaire remporte les élections, Dolores Ibárruri est élue députée des Asturies. Dès son élection, elle se rend à Oviedo où sont emprisonnés des militants politiques socialistes, communistes et républicains ; après d’âpres négociations avec la direction de la prison, elle obtient la libération des prisonniers.
En juillet 1936, quand la guerre civile d’Espagne éclate, Dolores prend la parole au ministère de l’Intérieur pour défendre la république. « Ouvriers ! Paysans ! Antifascistes ! Espagnols ! Patriotes ! Face au soulèvement militaire fasciste, tous debout pour défendre la République, pour défendre les libertés populaires et les conquêtes démocratiques. Tout le pays vibre d’indignation devant ceux qui veulent engloutir l’Espagne dans un enfer de terreur et de mort. Les fascistes ne passeront pas. No pasaran. »
Ce cri ¡No Pasarán!, prononcé avec tant de ferveur, devient le mot d’ordre officiel, le cri de ralliement des républicains contre les nationalistes. Cet épisode transformera Dolores en icône, en symbole populaire, au point que le mythe dépasse souvent la réalité.
Exil en Union Soviétique
Infatigable, Dolores Ibárruri mobilise les travailleurs, les soldats, se rend en France pour rencontrer Léon Blum, organise un rassemblement au vélodrome d’Hiver avant de rentrer en Espagne pour participer à la défense de la capitale. Elle participe à des comités de défense de la république, organise des manifestations, s’efforce de soutenir le moral des soldats républicains. Certains lui reprochent de rester à l’arrière tandis que son mari et son fils Rubén, revenu d’Union Soviétique, mais les actions de Dolores lui valent une grande popularité dans l’opinion publique coommuniste.
Lorsque les troupes franquistes entrent finalement dans Madrid en avril 1939, Dolores s’exile en Union Soviétique où elle poursuit ses activités militantes. En août 1942, son fils Rubén meurt au front au cours de la bataille très meurtrière de Stalingrad. Terrassée par ce nouveau drame, Dolores endosse malgré tout le rôle de secrétaire générale du PCE, qu’elle gardera jusqu’en 1960 ; cette année-là, elle devient présidente du parti.
A la mort de Franco en 1975, Dolores rentre en Espagne, où elle se fait rapidement élire députée aux Cortes, plus de quarante ans après sa première élection de 1936.
Dolores Ibárruri meurt le 12 novembre 1989, à l’âge de 93 ans, d’une pneumonie.
Source HistoireParolesdefemmes
Liens utiles
Page Wikipédia de Dolores Ibárruri
Page Wikipédia de Dolores Ibárruri en anglais (plus complet)
Dolores Ibárruri (Universalis)
Dolores Ibárruri : Pasionaria pour toujours
Le mythe de Dolores Ibárruri
10:41 Publié dans Biographie, Espagne, Guerre d'Espagne, Politique, Russie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pasonaria, dolores ibarruri | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook |
05/05/2020
150éme anniversaire de la naissance de Lénine
Il y a 150 ans le 22 avril 1870 naissait Vladimir Ilitch Oulianov, plus connu sous le nom de Lénine. Rares sont les êtres humains à avoir autant contribué à redéfinir l’histoire humaine. Militant et dirigeant révolutionnaire de premier plan, théoricien d’une grande valeur appelé à commander des évènements colossaux, il contribua, avec d’autres mais de manière décisive, à ébranler le monde en reversant la Russie tsariste et à ériger l’Union des républiques socialistes soviétiques que les opprimés du monde entier observaient avec espoir et fierté. Le rapport de force qui naquit de ces évènements fondateurs permit de mettre en frein aux sanglantes ambitions capitalistes et, grâce aux partis communistes notamment en Europe, de mener des conquêtes inestimables pour la liberté, l’égalité et la fraternité.
Commentateur érudit de l’œuvre de Karl Marx, Lénine chercha sa vie durant à lui faire justice et à s’en rendre le plus fidèle possible, notamment face aux tentatives révisionnistes qui essaimèrent au sein du mouvement social-démocrate – dont il était- alors proéminent dans le mouvement socialiste, et particulièrement de la social-démocratie allemande. Et l’on sait désormais ses doutes et craintes, dans ses trop précoces dernières années, sur la suite des évènements au cœur de cette Russie ébranlée par une guerre civile dévastatrice et en proie aux ambitions. Pour Lénine, contrairement à de persistantes idées reçues, toute transformation sociale, toute visée communiste, ne pouvait qu’être le fruit d'un long processus régulièrement remis sur le métier. En témoigne, entre autres, l’adoption en 1921 de la Nouvelle politique économique.
Sa mémoire et son œuvre furent prisonnières à la fois d’une hagiographie irraisonnée et d’une haine qui reste toujours vivace. Les polémiques souvent aigres dont on l’accable masquent mal la persistance d’un anticommunisme viscéral, et souvent la méconnaissance de l’œuvre pléthorique que cet infatigable travailleur nous aura léguée. Le silence entourant cet anniversaire est une anomalie, une injustice.
Ces écueils laissent peu de place à l’homme d’Etat, au militant politique à l’intellectuel, dans sa vérité et ses contradictions. Aujourd’hui encore, son legs rencontre un écho puissant à travers les continents, pour nombre de militants engagés contre les injustices, pour la paix et la liberté.
La plus grande justice qui puisse désormais lui être rendue serait d‘être lu, étudié, commenté et discuté, avec sérieux et sérénité, pour tirer de son œuvre et de son action les enseignements nécessaires à toute perspective de transformation sociale, environnementale, démocratique. De ce point de vue la lecture du livre récent de notre regretté Lucien Sève « Octobre 1917… Choix de textes de Lénine »
Patrick Le Hyaric
22 avril 2020
11:23 Publié dans Actualité, Biographie, Russie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : lénine | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook |
27/03/2018
Valentina Terechkova, la première femme dans l’espace
Valentina Vladimirovna Terechkova (née en 1937), est la première femme de l’histoire à avoir effectué un voyage dans l’espace, et la seule femme à avoir effectué ce voyage en solitaire.
Valentina Terechkova nait le 6 mars 1937 à Maslennikovo, en Russie, d’un père agriculteur et d’une mère ouvrière dans une industrie textile. Elle commence l’école à 8 ans mais la quitte à 16 ans, continuant des études par correspondance et se faisant embaucher comme ouvrière dans une industrie textile. Dès sa jeunesse, elle s’intéresse au parachutisme et s’y entraine, faisant son premier saut à 22 ans, en 1959.
En 1961, après le vol réussi de Youri Gagarine, Sergueï Korolev, le responsable du programme spatial soviétique, décide d’envoyer une femme dans l’espace. Parmi 400 candidates, il sélectionne 5 femmes, dont Valentina, avec notamment les critères suivants : être parachutiste, avoir moins de 30 ans, faire moins d’1m70 et de 70 kilos. Issue d’un milieu prolétaire et fille d’un héros de la deuxième guerre mondiale (son père est mort à la guerre), Valentina est une candidate de choix ; elle est donc sélectionnée parmi les 5 candidates restantes par Nikita Khrouchtchev lui-même. Elle suit alors un entrainement intensif comprenant des vols sans gravité, des tests d’isolation, des sauts en parachute, des cours d’ingénierie et du pilotage.
La première femme dans l’espace
Le 16 juin 1963, Vostok 6 décolle sans accrocs et Valentina devient, à 26 ans, la première femme dans l’espace. En 70 heures et 41 minutes, elle effectue 48 orbites autour de la Terre. Malgré les nausées et l’inconfort qu’elle ressent pendant la majeure partie du voyage, elle tient un carnet de voyage et prend des photos de l’horizon qui seront ensuite utilisées pour identifier des couches d’aérosols dans l’atmosphère. Le 19 juin, au retour, Valentina s’éjecte comme prévu ; se retrouvant au-dessus d’un lac, elle parvient cependant à le survoler en parachute et à atterrir sur la terre ferme.
Tenue au secret, ce n’est que 30 ans plus tard qu’elle révèlera un dysfonctionnement de son vaisseau : pendant la phase de freinage, le vaisseau était orienté pour la montée et non la descente, ce qui l’éloignait progressivement de la Terre. Signalant l’erreur à l’équipe au sol, elle a put recevoir un correctif et régler le problème.
Après son vol, Valentina épouse le cosmonaute Andrian Nikolaïev et reprend ses études. Très sollicitée en politique, elle devient en 1971 membre du comité central du parti communiste de l’Union soviétique. En 1977, elle obtient un diplôme d’ingénierie. Malgré la chute de l’Union soviétique, elle n’a rien perdu de son prestige et est toujours considérée comme une héroïne en Russie.
A ce jour, elle reste la plus jeune femme à avoir volé dans l’espace, et la seule à avoir effectué un vol en solitaire.
17:28 Publié dans Biographie, Espace, Russie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : valentina terechkova, cosmonaute, russe | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook |