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27/01/2014

1934-2014 : LA DROITE EN MANIFESTATIONS

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Article publié par l'Humanité

Ce dimanche, une foule hétéroclite de catholiques intégristes, d'identitaires d'extrême-droite, de familles BCBG, de Bonnets rouges et de partisans de Dieudonné, a vite délaissé ses mots d'ordre hostiles à l'action gouvernementale pour appeler à l'insurrection réactionnaire et laisser libre cours à des slogans antisémites et xénophobes.

L'appel du nébuleux collectif "Jour de colère" est parvenu à coaguler la France de la réaction, ce dimanche, au vu des slogans proférés entre la place de la Bastille et les Invalides. Au départ du cortège, une foule hétéroclite, entre 17.000 personnes (police) et 160.000 (organisateurs), s'est réunie autour des mots d'ordre proférés à l'encontre des politiques sociales et sociétales menées par François Hollande. Ainsi, un animateur de la manifestation éructe au micro: "Vous êtes ici parce que vous ne supportez plus la médiocrité!". "Le peuple, la France en colère, on va se faire entendre!". Ou, plus menaçant: "François, t’as intérêt à nous écouter!".

"Journalistes collabos"

Parmi les participants, des soutiens de Dieudonné multiplient les quenelles collectives. Des couples BCBG reprennent des chansons du polémistes, dont le Chaud ananas qui a valu à son auteur une condamnation pour incitation à la haine raciale. Ailleurs, une charge en règle contre les médias: "Les journalistes collabos, on n’en veut pas!", "(notamment le) Petit Journal à qui nous réservons un accueil particulier".

Dans les rangs, des Bonnets rouges, ou revendiqués comme tels. Le collectif breton à l'origine de ce mouvement avait pourtant appelé à ne pas prendre part à la manifestation. Des drapeaux royalistes flottent aussi dans le ciel parisien. Les slogans anti-Hollande cèdent le pavé à des "Le roi à Paris, à mort la République".

Des groupuscules du Mariage pour tous, proches de l'extrême-droite, prennent aussi part à la démonstration ultradroitière. Comme les homens, torses à l'air lorsqu'il s'agit de prendre la pause.

A couvert lorsque les premières gouttes tombent sur le cortège.

Dans le cortège aussi, des familles traditionalistes relancent les slogans contre la loi consacrée au mariage pour tous.

Au bout du parcours, un barnum avec podium et écran géant, attend les manifestants. Jour de colère se présentait pourtant comme un collectif sans moyen. Les discours de fin de manifestation, déclamés par des anonymes représentants d'obscures mouvements, chauffent à blanc la foule qui entonne des "Hollande démission".

A 18 heures, heures de dissolution théorique de la manifestation, des groupes font face au cordon de CRS. "Police politique! Police politique" hurlent-ils. Des centaines de personnes, cagoulées et portant des masques de ski pour certaines, ont lancé des projectiles, bouteilles, pétards, barres de fer, poubelles et fumigènes contre les forces de l'ordre qui ont répliqué par des tirs de gaz lacrymogènes, a constaté l'AFP.

Ce dimanche 26 janvier 2014, Paris a pris des airs de 6 février 1934 (voir la vidéo).

Le MRAP demande que les "coupables de ce déferlement de haine antisémite soient lourdement sanctionnés". Pour le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (Mrap), cette manifestation "agrégeait dans la même haine antirépublicaine, les chrétiens intégristes homophobes et les nationalistes racistes islamophobes, renforcés par la composante radicale du public de l'antisémite Dieudonné". "Les organisateurs, poursuit le Mrap dans un communiqué, ayant semé le vent de la haine, ne pouvaient que récolter la tempête de la violence en fin de cortège."

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S.G. (photos Joseph Korda)

12/01/2014

Faisons aujourd’hui entrer les résistantes au Panthéon!

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À qui la patrie reconnaissante? Par Frédérick Genevée, historien.

"La décision présidentielle d’une ou de nouvelles panthéonisations est éminente. Elle devrait à mon sens reposer sur quelques principes. D’abord, dans la manière de décider. Si une consultation a été engagée, il me semblerait plus démocratique que cela soit le Parlement qui en décide et non un seul homme – fût-il élu au suffrage universel direct. Il faudrait aussi, non seulement en finir avec la masculinité caricaturale de cette institution, que l’on trouve non seulement inscrite dans sa devise « Aux grands hommes, la patrie reconnaissante », mais surtout dans sa composition.

Combien d’ouvriers au Panthéon?

Il me semble donc qu’il faudrait, cette fois-ci, faire entrer de nombreuses femmes au Panthéon. Pas une, pour se donner bonne conscience, mais plusieurs. Il n’est pas tolérable que seules deux femmes y reposent aujourd’hui, dont l’une parce qu’elle est la «femme de ».

Il est aussi nécessaire d’être attentif à la diversité sociale. Combien d’ouvriers au Panthéon? Aucun. Combien de personnalités issues de l’immigration ? Trop peu. Le Panthéon ne peut trouver ou retrouver sa fonction démocratique qu’en étant à l’image de ce que fut et est la société française.

Résistance

Si l’on accepte le principe de la panthéonisation et de l’érection d’un temple républicain, il faut y faire entrer celles et ceux qui ont servi la République et qui ont défendu ses principes démocratiques et d’égalité. Toutes les cultures et sensibilités politiques qui ont concouru à la défense de notre liberté doivent y être représentées, cela exclut évidemment les personnalités qui ont porté dans l’histoire de France des discours de haine, de racisme et d’antisémitisme, donc de l’extrême droite.

Il est enfin une période –outre celle de la Révolution française– qui peut incarner facilement, aux yeux de tous et notamment des plus jeunes, ce que furent le pire et le meilleur de la France, c’est évidemment celle de la Seconde Guerre mondiale. Et le meilleur, c’est la Résistance.

Il en découle qu’il faut faire entrer les résistantes au Panthéon ! Sans entrer en opposition avec d’autres propositions nombreuses et légitimes, plusieurs noms de personnalités circulent qui ont retenu mon attention parce qu’elles sont à la fois différentes mais ont en commun la Résistance, la déportation et une vie d’engagement. Je pense à Germaine Tillion, résistante, déportée à Ravensbrück, grande intellectuelle engagée contre la torture pendant la guerre d’Algérie. Je pense à Geneviève de Gaulle-Anthonioz, résistante, déportée à Ravensbrück, qui consacra ensuite une grande partie de sa vie, à la tête d’ATD-Quart Monde, à la lutte contre la pauvreté.

D’autres femmes, d’autres résistantes ont partagé avec elles l’enfer de Ravensbrück. Je voudrais ici montrer en quoi leur parcours mérite le Panthéon. Marie-Claude Vaillant-Couturier, jeune photographe engagée, a fait en 1933 les premiers reportages clandestins sur les camps de concentration nazis d’Oranienburg et de Dachau ; résistante, elle est déportée à Auschwitz, puis à Ravensbrück. Elle est ensuite la seule femme à témoigner au procès de Nuremberg ; élue députée communiste, elle s’engage pour la défense de nombreuses causes et est notamment la première, en 1964, à prendre, à l’Assemblée, la défense de Mandela et de ses compagnons condamnés par le régime de l’apartheid.

Emancipation

Enfin, Martha Desrumaux, ouvrière textile: elle s’engage très tôt dans le syndicalisme et au Parti communiste, dont elle devient une des dirigeantes ; résistante, elle fut aussi déportée à Ravensbrück. Sa présence comblerait l’absence totale des ouvriers parmi ceux qui sont honorés au Panthéon.

À elles quatre, elles incarnent la diversité des engagements et la lutte pour l’émancipation des femmes. Elles méritent d’être honorées et d’être montrées en exemple en ces temps où la bête immonde surgit à nouveau.

Frédérick Genevée, l'Humanité

02/01/2014

Républicain espagnol et communiste, Virgilio Peña a cent ans aujourd'hui...

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Chronique de Jean Ortiz. Humble ouvrier agricole andalou, Virgilio est devenu un "héros" malgré lui, une "estrella" (une star) dit-il en pouffant de rire, grâce à son épopée et au documentaire Rouge miroir (Dominique Gautier et Jean Ortiz). La télé publique andalouse l'a programmé à plusieurs reprises. Le centenaire a une allure, un humour, une verve, une mémoire de jeune homme. Et des idéaux intacts."Toute ma vie j'ai été communiste. Et j'en suis fier."

Virgilio est né le deux janvier 1914, d'un père ouvrier agricole et d'une mère vendeuse de "churros", dans un village emblématique de la province de Cordoba: "Espejo" (en français: "miroir", cela ne s'invente pas), village à la blancheur rebelle, inondé d'oliviers et dominé par le château de la duchesse.
Son père, autodidacte, l'appela Virgile, du nom du poète latin qu'il lisait le soir, couché sur la paille. Lors du soulèvement paysan de 1918, la garde civile le tabassera jusqu'à le laisser "estropié". Il en mourra. Les reîtres bruleront ses livres (Virgile, Hugo...) sur la place du village.
Très jeune, Virgilio Peña (en espagnol, la "peña", c'est le rocher, cela ne s'invente pas non plus) adhère à la Jeunesse communiste, qui prône "la revolucion social".

Lorsque le 14 avril 1931 est proclamée en Espagne la République, le jeune ouvrier agricole ("jornalero") hisse le drapeau républicain au balcon municipal, "paseo de las Calleras". La République puis le Front populaire améliorent la vie, les conditions, jusque là esclaves, de travail des millions de "sans terre de l'époque". Même si la réforme agraire reste timide...Timide mais insupportable pour les grands propriétaires, les "caciques", l'oligarchie, l'Eglise, l'armée, la banque...

Lorsque le coup de force fascisant (le 18 juillet 1936) ensanglante le pays, le milicien Virgilio participe à la défense de son village andalou, puis rejoint le "bataillon Garcés". Il est aux premières lignes des combats acharnés de Pozoblanco, Villa del Rio, Lopera... L'intervention massive de Hitler et Mussolini, et l'hostilité antirépublicaine des gouvernements anglais et français, vinrent à bout de l'armée populaire.
La suite est connue. Internement honteux dans les camps, appelés "de concentration", du gouvernement Daladier et de la Troisième République: Barcarès et Saint-Cyprien.

En vidéo : un extrait de Rouge miroir de Dominique Gautier et Jean Ortiz

Envoyé à Bordeaux, Virgilio trime dans les vignobles puis à la construction de la "base sous-marine" allemande. Dès le début de 1942, il fait partie des premiers groupes de résistants. Le 19 mars 1943, il est arrêté et torturé par la police française puis livré aux nazis, qui le déportent en septembre 1943 à Buchenwald (matricule 40843), triangle rouge des "terroristes". Dans cet enfer, il organise la résistance du petit groupe d'Espagnols, et partage le même Block que Jorge Semprun. "Le 11 avril 1945, je suis né pour la deuxième fois. La résistance intérieure libère le camp, avant l'arrivée des Américains". Il en sort, la peau sur les os, en juin 1945, et rejoint Pau où il continue le combat antifranquiste avec ces camarades espagnols et français.

A cent ans, le jeune communiste Virgilio ne manque aucune manif, toujours un bon mot de "chispa" andalouse aux lèvres. Il y a des hommes "imprescindibles" (indispensables).

Publié par l'Humanité