Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

21/02/2016

« Qui n’a pas fait Verdun n’a pas fait la guerre »..., disent les survivants

verdun-19-02-2016.jpg

La bataille de Verdun a été un massacre effroyable. Mais si elle est devenue « la » bataille, c’est en raison de la noria des divisions, de la crainte de perdre la guerre, de la résistance française et de la valeur symbolique développée ensuite par un immense travail de mémoire.

De toutes les batailles de la Grande Guerre, celle de Verdun reste, dans notre mémoire nationale, la plus importante : c’est d’ailleurs la seule qui figure au programme d’histoire des collégiens. Comment expliquer ce statut exceptionnel ?

Une première explication est l’extraordinaire violence des combats jusqu’à l’été. C’est ce que signifiaient, au moment même, les soldats et officiers quand ils disaient : « Qui n’a pas fait Verdun n’a pas fa it la guerre. » De fait, les documents témoignent d’une lutte d’une rare intensité : on se bat dans des trous d’obus, plus ou moins reliés entre eux pour former des tranchées, sous le bombardement constant d’obus souvent de gros calibre. Se montrer de jour est s’attirer aussitôt des balles. La nuit, on veille, on travaille à renforcer les positions, on ne dort pas vraiment ; les corvées en tout genre et les brancardiers sillonnent le champ de bataille. Les survivants qui descendent du front semblent revenir de l’enfer.

Cette explication n’est pourtant pas suffisante. Verdun a été pire que les batailles précédentes, auxquelles les témoins la comparaient, mais les suivantes ont sans doute été plus dures encore, car l’escalade des bombardements n’a pas cessé ; après chaque échec, les états-majors ont conclu qu’ils n’avaient pas frappé assez fort, et ils ont frappé plus fort la fois suivante. Le million d’obus tirés par les Allemands le premier jour de l’offensive représente moins de quatre jours de la production française d’obus en 1918. Le nombre des morts de Verdun est impressionnant – 143 000 Allemands et 163 000 Français –, mais, compte tenu des effectifs, les pertes françaises sont plus lourdes sur la Somme qu’à Verdun. Les récits de la Somme ou du Chemin des Dames, en 1917, sont aussi terribles que ceux de Verdun : ils disent la faim, la soif, la boue – qui colle aux habits et happe parfois les soldats –, les bombardements incessants, les blessés, les cadavres et débris humains, la puanteur, les mouches, la mort présente à tout instant. Verdun est certes un peu différente : sur ce plateau entaillé de multiples ravins profonds, c’est un combat de petits groupes, à la grenade, alors que les autres batailles, en terrain moins mouvementé, mettent aux prises des lignes plus nettes, sur un front plus large. Mais c’est partout l’enfer.

D’autres raisons interviennent. La première est la « noria ». Le commandement français a en effet remplacé les divisions épuisées par des divisions fraîches, alors que les Allemands reconstituaient sur place leurs unités par des renforts. De ce fait, 70 divisions françaises ont combattu à Verdun, sur une centaine. Verdun est la bataille qu’ont « faite » le plus grand nombre de soldats français. En outre, elle est purement française, car les alliés n’y ont pas participé directement.

Les soldats ont intériorisé l’enjeu

Mais la vraie raison est l’importance de l’enjeu. C’était la première fois, depuis 1914, que les Allemands attaquaient, et en force. Tous les Français ont craint de perdre la guerre. À la fin de la semaine qui commence le 21 février, l’angoisse règne : la défaite sera-t-elle enrayée ? La population anxieuse guette les communiqués, la presse se veut rassurante, mais enregistre les reculs. Les hommes politiques s’agitent : c’est à Verdun que se joue le sort de la nation. Dans les semaines qui suivent, c’est là que ministres, parlementaires, journalistes, académiciens, diplomates, veulent aller, et pouvoir dire qu’ils y sont allés.

Les soldats ont intériorisé l’enjeu : ce n’est pas une bataille comme les autres, c’est « la » bataille, et il est juste que chacun y passe à son tour : la noria trouve là sa justification. Le moral des soldats n’est pas constant ; il y a des moments de lassitude, et même des refus de monter en ligne, mais aux moments les plus décisifs, ils consentent des sacrifices surhumains, et l’on peut parler d’héroïsme. Il ne faut pas que les Allemands passent. Le « mythe » de Verdun se constitue pendant la bataille elle-même : c’est le symbole de la résistance française.

Un immense travail de mémoire a développé ensuite la valeur symbolique de Verdun : les combattants sont revenus en pèlerinage, seuls, en famille, en groupes organisés par leurs associations ; un comité a construit l’ossuaire de Douaumont, grâce à des souscriptions de plus d’une centaine de villes françaises et étrangères, des manifestations commémoratives ont été organisées tous les ans. Les villes ont donné à des rues ou des places le nom de Verdun.

C’est parce que Verdun avait acquis cette valeur symbolique exceptionnelle qu’il n’y avait pas de meilleur lieu pour manifester la réconciliation des deux peuples par un geste spectaculaire et silencieux, la poignée de main du président Mitterrand et du chancelier Kohl, le 22 septembre 1984.

Repères

  • 21 février 1916. Début de l’offensive allemande. Quatre jours plus tard, le fort de Douaumont est enlevé.
  • 18 juin. Les Allemands, à portée de vue de Verdun, bombardent le secteur avec des obus au phosgène.
  • Du 21 au 24 octobre. Les Français pilonnent les lignes allemandes. Les Français reprennent Douaumont.
  • Mi-décembre. Après 300 jours, les troupes allemandes sont refoulées sur leurs positions de départ.

Attaques et contre-attaques. Les Allemands attaquent au nord de Verdun, sur la rive droite de la Meuse, le 21 février 1916, à 7 heures, par un bombardement massif. En cinq jours, ils avancent de 6 à 8 kilomètres et prennent le fort de Douaumont. Ils sont arrêtés par l’arrivée de renforts et la réorganisation du commandement, confié au général Pétain, mais, le 6 mars, ils attaquent aussi rive gauche. Jusqu’à la fin du mois de juin, attaques et contre-attaques font rage. Les Allemands parviennent à 4 kilomètres de Verdun, mais l’offensive alliée sur la Somme, le 1er juillet, les oblige à desserrer l’étreinte. Les Français passent à l’offensive, reprennent les forts de Douaumont puis de Vaux, et reviennent à leur front de départ, rive droite, le 15 décembre. Ils crient victoire mais ne reprendront qu’en août 1917 le terrain perdu rive gauche.

Antoine Prost, professeur émérite, université Paris-I Antoine Prost
Vendredi, 19 Février, 2016
L'Humanité
 
Google-Translate-English to French Traduire français en German  Traduire français en Italian Google-Translate-English to Japanese BETA  Traduire français en Portuguese  Traduire français en Russian  Traduire français en Spanish Traduire français en Arabic  Traduire français en danish Traduire français en Greek
 

23/12/2015

Cinéma : "Adama", un chef-d'oeuvre d'animation en l'honneur des Tirailleurs

adama.jpg

À travers l'odyssée du jeune Adama dans l'enfer des tranchées, ce film nous conte l'histoire de ces Africains perdus dans la mémoire de la Grande Guerre.

Rendre compte du sort des tirailleurs sénégalais durant le carnage de la Première Guerre mondiale dans un film d'animation pour grands et surtout pour petits n'est pas une chose aisée. Pour son premier long métrage, entièrement conçu sur l'île de La Réunion par une cinquantaine de personnes pour un budget de quatre millions d'euros, le jeune réalisateur Simon Rouby a su frapper un grand coup. D'ailleurs, son film labellisé par la Mission du Centenaire a déjà participé à une trentaine de festivals aux quatre coins du monde, du Festival international du film d'animation d'Annecy au Children Film Festival Chicago en passant par le Film Africa London.

Ce conte moderne, à mille lieues des blockbusters aseptisés de Disney, reçoit en guest-star le rappeur Oxmo Puccino, qui non seulement prête sa voix à l'un des personnages du film mais a aussi composé le titre phare de la bande originale.

Une intrigue simple et efficace

L'aventure est menée tambour battant par un enfant en 1916. Du haut de ses douze ans, Adama décide seul de braver l'interdit des anciens en quittant son village d'Afrique de l'Ouest à la recherche de son frère aîné Samba.

Ce dernier s'est enfui pour se faire enrôler au sein de l'armée française dans une ville portuaire. Naïf mais obstiné, Adama part au péril de sa vie sur ses traces en France pour tenter de le ramener, car « le village est un endroit encore préservé, surtout aux yeux d'Adama, qui au début du film y vit comme dans un jardin d'Eden et n'a pas conscience de l'avancée inexorable du monde extérieur.

Pourtant, ce monde colonial et guerrier est en marche et le village ne pourra pas rester intact », explique le réalisateur. Sous les yeux enfantins du héros se dévoile la brutalité de l'enrôlement des tirailleurs sénégalais comme la tragédie subie par tous les soldats, blancs ou noirs, dans les tranchées de Verdun. « Si le film peut avoir comme impact de changer notre regard sur notre histoire, d'aider à comprendre que nos destins au Sud comme au Nord sont inexorablement liés, il aura fait œuvre utile », précise-t-il.

Le film s'inspire de la vie d'Abdoulaye N'Diaye

 

img_tirailleurs_expos.jpgDernier survivant de la Force Noire envoyée par la France sur les champs de bataille de la Première Guerre mondiale, Abdoulaye N'Diaye allait enfin recevoir la Légion d'honneur en 1998 lors de la célébration des 80 ans de la victoire de 1918.

Hélas, le 11 novembre, veille de la cérémonie d'honneur, Abdoulaye N'Diaye s'est éteint à 104 ans dans son village de Thiowor au nord de Dakar. Par chance, son petit-fils avait pu recueillir juste à temps les confidences de son aïeul, celles d'un homme contraint de quitter son village pour combattre dans un monde étranger. Le petit-fils les rapporta quelque temps plus tard à Julien Lilti, alors étudiant, qui deviendra coauteur du film Hippocrate, long-métrage nominé aux derniers Césars, et qui se rendra compte du potentiel du récit.

Extrait article publié dans le Point

Google-Translate-English to French Traduire français en German  Traduire français en Italian Google-Translate-English to Japanese BETA  Traduire français en Portuguese  Traduire français en Russian  Traduire français en Spanish Traduire français en Arabic  Traduire français en danish Traduire français en Greek

01/12/2015

17 avril 1961 : Quand Cuba ridiculise les Etats-Unis

Politique, 17 avril 1961, bombardements, crise des missiles, Cuba, Etas-Unis, Fidel Castro, Guerre Froide, La Baie des cochons, non aligné, URSS

Le 17 avril 1961 marque la rupture définitive entre Cuba et les Etats-Unis. L’épisode de la baie des cochons, qui est une humiliation pour les Américains, envoie un message clair de dissidence à la toute puissante nation de l’oncle Sam.

La révolution des partisans de Fidel Castro amène un vent de changement dans l’île de Cuba. Jusqu’ici, contrôlée par les Etats-Unis, Cuba ne peut espérer une indépendance économique totale, ni exercer aucune influence sur son destin.

Cuba est socialiste, comme la majorité des états du tiers-monde à la même époque. La Russie, alors forte de l’URSS est en pleine guerre idéologique (Guerre Froide) avec les Etats-Unis. Les deux blocs se disputent l’influence des autres pays du monde pour asseoir leur pouvoir. Aussi, chaque état qui se rapproche de l’Union Soviétique représente, d’une part, un risque pour le modèle américain, d’autre part, la preuve d’une remise en question de l’hégémonie américaine.

En 1959, les "castristes" arrivent au pouvoir et lancent une série de réformes visant à l’autogestion de l’île par les nationaux. Le premier de ces changements significatifs se fait dans le domaine de l’agriculture. Ainsi, Cuba nationalise ses terres et récupère toutes celles qui appartiennent à des étrangers, avant de les expulser. Les anciens propriétaires qui demeurent sur l’île voient leur monopole amoindri, tant sur leurs bénéfices que sur leurs employés. Désormais, tous les terrains agricoles appartiennent à l’état souverain et chaque ouvrier travaille pour le  profit du pays tout entier. Castro veut la liberté et le communisme, il va donc jusqu’au bout de son programme de réappropriation de l’économie cubaine. Les Etats-Unis, qui jusqu’ici avaient fait de Cuba un pied-à-terre, voient cette campagne d’un mauvais œil. En 1960, ils organisent le blocus de l’île : tous les échanges commerciaux entre les deux nations sont interrompus. En janvier 1961, les relations diplomatiques sont suspendues.

Washington décide d’attaquer militairement Cuba, avec l’aide de nationaux, membres de l’opposition, enrôlés et entraînés aux Etats-Unis. Les 1400 insurgés ont pour mission de s’emparer d’une colline située dans la région de La Baie des cochons, point stratégique pour le contrôle de l’île. L’assaut, organisé par la CIA, a lieu au matin du 15 avril 1961. Les avions militaires américains ont été maquillés aux couleurs de Cuba. Les bases aériennes militaires ainsi que les aéroports civils sont bombardés, en dépit de l’interdiction de survoler l’île pour les Etats-Unis. Les avions décollent du Nicaragua et attaquent principalement La Havane et Santiago. 268 personnes sont tués en 48 heures.

Le 17 avril, Cuba contre-attaque. Quelques avions militaires ont été épargnés, ce qui permet à l’état de bombarder ce qu’il reste d’aviation américaine. L’opération est appuyée par l’aide des civils pros-Castro, qui refusent de collaborer avec les opposants, alors alliés aux Etats-Unis. Les hommes de Fidel Castro, les miliciens et l’armée, réussissent ainsi à mettre à mal l’ennemi dans la Baie des cochons forçant  ainsi la reddition des assaillants.

Cet épisode est un échec dans l’histoire américaine et une victoire pour les états non alignés. Victoire qui  entérine la lutte des pays du tiers-monde pour l’indépendance et la souveraineté. Il donne par ailleurs l’avantage au  le bloc soviétique et décide Cuba à s’afficher ouvertement comme allié de l’URSS. La Baie des cochons va définitivement transformer Cuba en terrain d’affrontements entre le modèle américain et le modèle soviétique. Cela donnera lieu, l’année suivante, à la crise des missiles et à une interruption de 54 ans dans les échanges entre les deux états.

L’épisode de La Baie des cochons est célébré chaque 17 avril à Cuba. Des boulets de canon sont tirés depuis la Baie de La Havane. Jusqu’aujourd’hui, des militaires défilaient dans les rues de l’île et la célébration se faisaient en grandes pompes. Toutefois, les deux états s’étant engagés dans une démarche d’apaisement des relations diplomatiques, la célébration sera désormais plus sobre.

Sources Nofi

Google-Translate-English to French Traduire français en German  Traduire français en Italian Google-Translate-English to Japanese BETA  Traduire français en Portuguese  Traduire français en Russian  Traduire français en Spanish Traduire français en Arabic  Traduire français en danish Traduire français en Greek