17/03/2018
Jeanne Labourbe : La 1ère communiste française
Jeanne Labourbe dès le début a soutenu la Révolution Russe et s'engage dans l'Armée Rouge. Elle est violée et exécutée à Odessa, début mars 1919, par des soldats français et russes blancs. Elle devint la première martyre du communisme français.
Jeanne Labourbe naquit à Lapalisse en 1877 dans une famille de journaliers marqués par les idées républicaines.
… En 1896, la jeune fille de 19 ans, repasseuse de son état, tombe sur une annonce réclamant les services d’une gouvernante en Pologne (alors rayée de la carte). Elle se rend sur place – dans l’empire russe –, exécute des travaux ménagers tout en apprenant le français aux enfants de ses employeurs.
Elle se lie avec la famille d’un déporté politique, s’initie à la question sociale et devient courrier au service de la révolution qui fermente. En 1905, elle se jette dans la mêlée libératrice amenée à échouer. Elle change de prénom. Voici désormais « l’institutrice Jeanne Labourbe », comme elle ne cessera plus d’être désignée.
Premier membre français du Parti bolchévique, Jeanne Labourbe intégra un groupe d'interprètes dont le but était de tenter de rallier à la cause des soviets le plus possible de soldats occidentaux engagés aux côtés des Russes blancs (pro-tsaristes) dans la guerre civile qui avait éclaté au lendemain de la Révolution d'octobre.
Après la révolution d’octobre 1917, la Russie connaît à la fois la guerre civile et l’intervention étrangère. Lénine signe la paix avec l’Allemagne. Mais les pays de l’Entente (France, Angleterre, Grèce, Japon, États-Unis…) veulent isoler l’Europe de la contagion des idées révolutionnaires. Ils vont même jusqu’à débarquer en Russie septentrionale : les Anglais attaquent dans la Baltique et en Mer Noire, les Turcs pénètrent dans le Caucase, les Américains et les Japonais occupent Vladivostok.
Clémenceau conçoit une gigantesque opération de soutien aux armées Blanches, les armées contre-révolutionnaires. Entre décembre 1918 et janvier 1919 Sébastopol, Odessa, Nikolaïev et Kherson sont occupées. Simultanément les forces Blanches attaquent en Crimée.
En 1919, bon nombre de soldats ne sont toujours pas démobilisés. Le « ras-le-bol » et le refus de jouer aux contre-révolutionnaires, de se transformer en « gardiens de la bourgeoisie » vont aboutir à des mutineries. Les premiers soulèvements ont lieu dans les troupes terrestres dès février.
André Marty raconte comment Jeanne Labourbe se retrouve à Odessa :
Elle était frémissante quand elle apprit que les soldats français avaient débarqué à Odessa. Elle ne pouvait supporter l’idée, disait-elle, que « les fils des communards de 71, les descendants des révolutionnaires de 93, viennent étouffer la grande révolution russe. » […] Elle obtint du Comité central du Parti d’être envoyée à Odessa. Elle y arriva en traversant le front.
Elle se jeta dans l’action avec sa foi, son enthousiasme. Elle remaniait la rédaction des tracts, des journaux, trouvant toujours qu’ils n’étaient pas assez vivants, qu’ils n’accrochaient pas assez le cœur des soldats … »
Elle fait diffuser dans les cantonnements, par des enfants censés écouler journaux et cigarettes, des tracts, des brochures, ainsi que Le Communiste, une feuille qu’elle rédige sur place, cachée par une militante de 67 ans, Mme Leifmann. C’est là, rue Pouchkinskaïa, dans la nuit du 1er au 2 mars 1919, que tout se noue, selon le récit qu’en fera Radkov, un militant bolchevique serbe présent sur place mais qui pourra s’échapper – au point d’être un temps soupçonné par ses camarades de parti – et survivre à la vengeance contre-révolutionnaire. Radkov précise qu’en plus de Jeanne Labourbe et Mme Leifmann, étaient présents les trois filles de celle-ci et le tailleur Lazare Schwetz :
« Nous jouions aux cartes et aux dames, lorsque, tout à coup, on frappa à la porte et, sans attendre, on l’ouvrait toute grande d’un coup vigoureux. Dix hommes entrèrent en trombe et dirigèrent leurs revolvers sur nous, en criant : “Haut les mains !” Ces hommes étaient cinq officiers volontaires (deux généraux, deux colonels et un subalterne), quatre officiers français (trois officiers d’infanterie et un officier de marine) et un civil. »
L’appartement est mis à sac, ses occupants transférés à la Sûreté militaire, torturés puis traînés jusqu’au cimetière juif pour y être abattus à coups de revolver. Selon le récit canonique bolchevique alors mis en place et que reprendra consciencieusement André Marty, toute la population d’Odessa visite la morgue pendant les jours qui suivent. Les cadavres des assassinés présentent un spectacle horrible : tous, sans excepter la vieille Leifmann, ont le visage défiguré, le corps couvert de bleus et de plaies causées par les baïonnettes : « Jeanne Labourbe ne put être reconnue que par ses cheveux courts et ondulés et le vieux paletot qu’elle portait toujours. Il est certain qu’au moment où Radkov s’enfuit, les victimes essayèrent aussi de se défendre et de s’échapper ; blessées, elles furent certainement achevées avec rage. »
Le 5 avril 1919, les révolutionnaires reprennent la ville d’Odessa aux Blancs et des funérailles grandioses sont organisées en l’honneur de Jeanne Labourbe et de ses camarades assassinés. Dans La Pravda du 25 mars 1919, Niourine, le camarade russe du Groupe communiste français de Moscou, écrit : « Le prolétariat français immortalisera ce nom honoré de la première femme communiste française qui sut lutter pour la révolution. »
Sources : Compagnie Jolie Mome, Palicia.blogpost, Humanité hors série sur la Révolution d'Octobre
17:44 Publié dans Biographie, PCF, Première guerre mondiale, Révolution, Russie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jeanne labourbe, communiste, russie, bolchéviques | |
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22/01/2018
La République de Weimar révélée par ses peintres
Jean-Jacques Régibier, Humanite.fr
Comment réagissent les artistes dans un pays confronté à la montée de la violence et à la misère, après avoir affronté la guerre la plus terrifiante de son histoire ? En 190 œuvres et 62 artistes, la Schirn Kunst Halle de Francfort démontre la prodigieuse vitalité de l’art en Allemagne sous la République de Weimar, juste avant la nuit noire du nazisme.
« Le plus grand miracle, c’est la réalité. »

« Nous méprisions simplement tout, » expliquera George Grosz, « rien ne nous était sacré, nous crachions sur tout, et c’était dada. »

12:01 Publié dans Culture, L'Humanité, Peinture, Première guerre mondiale | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : weimar, république, peinture | |
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29/05/2016
L’Assemblée refuse la réhabilitation collective des fusillés de 14-18
Une nouvelle loi proposée par les députés Front de gauche, après l’encadrement des salaires des patrons, a été rejetée jeudi. Alors que vont débuter les commémorations du centenaire de la bataille de Verdun, l’Assemblée a refusé de réhabiliter de manière collective les fusillés pour l’exemple de 14-18.
A la demande du secrétaire d'Etat chargé des Anciens combattants, Jean-Jacques Todeschini, la majorité du groupe PS, les radicaux de gauche, les élus de droite et du centre ont voté un amendement supprimant l'article unique du texte. Défendue par le groupe front de gauche et par son président le député André Chassaigne, cette loi avait pour but de « de porter une exigence de justice à l’égard de tous ces « civils déracinés » dont parlait Henri Barbusse, sous l’uniforme desquels on reconnaissait le laboureur et l’ouvrier, et qui furent condamnés à mort, le plus souvent de manière expéditive par des conseils de guerre spéciaux ou parfois de simples officiers, pour refus d'obéissance, abandon de poste ou désertion à l'ennemi… »
650 fusillés pour l’exemple pour des faits de désobéissance étaient concernés, et non les soldats condamnés pour crimes de droit commun et espionnage.
C’est le député Jean-Jacques Candelier qui portait la loi. Dans son adresse à l’Assemblée, il expliquait : « Le Parlement n’a pas pour mission de juger, et ce n’est pas la prétention de la présente proposition de loi. Aujourd’hui, il est simplement question de s’interroger sur la place que la Nation souhaite réellement accorder à ces soldats au sein de sa mémoire. En déposant une proposition de loi visant à procéder à une réhabilitation des « fusillés pour l’exemple » de la Première Guerre mondiale, les députés du groupe GDR poursuivent modestement le combat entamé dès les premiers mois de la Grande guerre par certains de nos illustres prédécesseurs, comme les députés Jean Parvy, Louis Andrieux, Jean-Baptiste Giray, Aristide Jobert ou Paul Meunier, qui s’exclamait à la tribune en 1916 : « Il faut en finir, Messieurs, avec les crimes des conseils de guerre ».
C’est pour cette raison qu’il lui faut aujourd’hui procéder à une réhabilitation collective et générale des fusillés et demander pardon à leurs descendants de les avoir oubliés, stigmatisés, et rejetés, alors même que dans l’ensemble, ceux-ci ont pour la plupart combattu, brandissant leurs baïonnettes face à l’artillerie pour défendre la patrie. C’est à ce prix que la nation cessera d’être hantée par Alphonse, Octave, Louis, Eugène, Paul, Emile, Lucien et les autres. C’est à ce prix que nous pourrons rendre justice à ceux ayant connu l’épreuve tragique de l’épée qui se baisse, du bruit fracassant des douze coups de fusil et du bruit mat des balles qui pénètrent dans les corps, du coup de grâce dans la tempe, de la parade devant le corps. »
Mais pour le secrétaire d'Etat aux Anciens combattants, "le moment n'est pas venu" pour une réhabilitation générale. Jean-Jacques Todeschini a rappelé que le Premier ministre Lionel Jospin avait rendu en 1998 un hommage inédit aux "fusillés pour l'exemple" et que dix ans plus tard, le président Nicolas Sarkozy avait fait de même à la mémoire de tous les soldats de la Première Guerre mondiale, sans exception.
Le secrétaire d'Etat a également rappelé l'annonce faite en 2013 par François Hollande de la création d'un espace consacré aux fusillés au Musée de l'Armée aux Invalides, ainsi que la numérisation et la mise en ligne sur le site "Mémoire des Hommes" des dossiers des conseils de guerre. Ces mesures sont effectives depuis le 11 novembre 2014.
Jean-Jacques Candelier. « Ce n’était pas infâmant de reculer de quelques dizaines de mètres, surpris par une attaque, pour mieux repartir au combat. Ce n’était pas infâmant de ne pas sortir de sa tranchée, quand devant vos yeux s’amoncellent les corps de vos camarades tombés par vagues lors d’absurdes attaques. Ce n’était pas infâmant de ne parler que corse ou breton et de ne pas être en mesure d’expliquer sa blessure. Pourtant, nombre de soldats français sont morts sous les balles de leurs camarades pour de tels faits. Les histoires du soldat Lucien Bersot, exécuté pour ne pas avoir voulu porter le pantalon tâché de sang d’un camarade mort au combat, ou du sous-lieutenant Chapelant, fusillé attaché à son brancard, sont les plus connues. »
Durant la Grande Guerre, 7,8 millions de Français ont été mobilisés. Au total, 1,3 million d'hommes ont été tués, laissant 700.000 orphelins et 600.000 veuves.
12:28 Publié dans Actualité, Première guerre mondiale, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : guerre 14-18, fusillés pour l'exemple | |
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