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22/01/2018

La République de Weimar révélée par ses peintres

weimar3.jpgJean-Jacques Régibier, Humanite.fr

Comment réagissent les artistes dans un pays confronté à la montée de la violence et à la misère, après avoir affronté la guerre la plus terrifiante de son histoire ? En 190 œuvres et 62 artistes, la Schirn Kunst Halle de Francfort démontre la prodigieuse vitalité de l’art en Allemagne sous la République de Weimar, juste avant la nuit noire du nazisme.

A peine 15 ans séparent les deux tragédies les plus terribles de l’histoire de l’Allemagne: la guerre de 14-18 et l’arrivée au pouvoir des nazis. Cette période est entièrement occupée par l’une des séquences historique les plus violemment contrastées de tout le XXème siècle, à laquelle les historiens ont donné le nom de République de Weimar : une alternance ininterrompue tensions sociales, politiques et économiques redoutables, accompagnées de tentatives révolutionnaires avortées, d’épisodes de guerre civile, dans un climat de révolte et d’humiliation, d’injustice et d’inégalités où l’espoir – pour emprunter l’expression de Maïakovski – est « un escargot rampant. » Sauf pour une poignée de profiteurs.
 
Ces évènements se déroulent dans un pays de très haute culture, qui compte un nombre impressionnant d’écrivains, de savants, de musiciens, de philosophes et de peintres, parmi les plus grands de toute l’Histoire. Entre 1919 et 1933, l’Allemagne n’assiste donc pas passive à son terrible destin. Elle se pense, et surtout elle se représente, spécialement dans les œuvres de ses peintres, qui vont réagir aux évènements dont il sont les témoins - et souvent les acteurs - « avec réalisme, franchise, ironie, colère, humour, allusion, retenue, ou mélancolie », explique Philipp Demandt, le directeur de la Schirn Kunst Halle.

« Le plus grand miracle, c’est la réalité. »

weimar2.jpgCe jugement du peintre Franz Radziwill, porté pour sa part vers l’onirisme et la magie, vaut pour toute la peinture de cette époque. Déjà Otto Dix, l’un des peintres majeur de la République de Weimar, combattant de la Grande Guerre dont il a peint toutes les horreurs avec détails sanguinolents et raffinement, avait adopté pour devise : « Crois en tes yeux. »
Car c’est bien ce monde tel qu’il est que vont s’acharner à représenter les peintres allemands de cette période, revenant de manière inattendue à la peinture figurative, au moment où les autres avant-garde d’Europe se sont engagées depuis longtemps dans des aventures artistiques - cubisme ou abstraction - pour lesquelles la référence à la réalité n’est plus qu’un lointain souvenir. Tout au contraire, chez les peintres de la République de Weimar, c’est bien la réalité qu’on peint, mais exclusivement cette réalité humaine qui se lit sur les visages et sur les corps - certains mutilés ou dégradés comme autant de marques de la barbarie de 14-18, ou de la misère, de la violence sociale ou de la prostitution qui lui ont succédé, ajoutant les siennes. Jamais aucun courant artistique n’aura été plus proche de la description de la société de son temps, de ses angoisses, de sa dureté, de ses tristes plaisirs et de ses perversions. C’est ce qui confère à toutes les œuvres exposées à Francfort leurs si fortes ressemblances.
 
Deux grands peintres dominent cette époque, aussi bien par leur puissance expressive et par la palette impressionnante des techniques qu’ils mettent en œuvre, que par leur productivité foisonnante: ce sont Otto Dix et George Grosz. Tous les deux ont en commun d’être issus du mouvement Dada qui continuera à marquer leur travail bien après la Grande Guerre, à laquelle ils ont tous les deux participé.

« Nous méprisions simplement tout, » expliquera George Grosz, « rien ne nous était sacré, nous crachions sur tout, et c’était dada. »

Weimar.jpgOtto Dix débute sa carrière au moment où apparaît l’expressionisme allemand dont on continue à lire l’influence - dans les déformations et la distorsion des traits – dans ses œuvres de la période de la République de Weimar. George Grosz, adepte des idées communistes, participera à l’insurrection spartakiste avant d’être contraint à l’exil.
 
Mais l’exposition de la Schirn Kunst Halle permet de découvrir aussi des dizaines d’autres peintres qui témoignent de la vitalité de la scène artistique allemande au moment même où le pays s’enfonce dans la misère et dans l’inconnu, installant une atmosphère d’incertitude qu’on lit dans l’inquiétante étrangeté des portraits de Karl Hubbuch, de Rudolf Bergander ou de Karl Völker, de Hans Christoph ou de Richard Ziegler. On découvre également l’importance qu’on eu pendant cette période les femmes peintres en Allemagne, comme Elfriede Lohse-Wächtler, Anna Nagel, Jeanne Mammen ou Hilde Rakebrand.
Un grand nombre des artistes de la République de Weimar seront persécutés, réduits au silence sous le nazisme, et presque tous estampillés «  artistes dégénérés » - Otto Dix « était tout en haut de la liste, » explique la chercheuse Gitta Ho.
 
Raison de plus pour s’intéresser de très près à ce moment exceptionnel de l’art du XXème siècle, apparu comme une puissante réaction de contestation face à une situation de crise majeure, sur fond de montée des intolérances et du racisme. Le public nombreux qui se presse à l’exposition de la Schirn Kunst Halle, semble prouver, par sa présence et ses commentaires, qu’il y a là une leçon qu’on aurait tort d’oublier.
 

05/01/2018

Galette des Rois. D'où vient cette tradition ?

galette des rois.jpgPour briller en société, faire le malin à l'apéro bref, pour frimer auprès des copains, voici LA question absolument essentielle du soir. Et la bûche de Noël à peine digérée, la galette des Rois s'invite déjà à toutes les tables. En dessert, au goûter, midi et soir, petits et grands adorent, d'autant plus qu'elle ne se déguste pas seulement à la frangipane. Mais d'où vient cette tradition ?

La galette des Rois pourrait tirer son origine des Saturnales, ces fêtes romaines de l'Antiquité célébrées à la fin du mois de décembre et au commencement de janvier. A cette occasion, un roi était élu et donnait des gages. Durant ces festivités, au moment du solstice d'hiver, maîtres et esclaves étaient sur un pied d'égalité et tout le monde mangeait à la même table.

Chez les Chrétiens, la galette se partage le 6 janvier, pour l'Épiphanie, « jour où les rois mages, guidés par la lumière d'une étoile, arrivèrent jusqu'à Jésus, dans l'étable où il est né ». Aujourd'hui, elle reste l'occasion de démarrer l'année de façon conviviale.

Les collectionneurs de fèves sont à leur affaire pendant cette période bénie. Pour la petite histoire, la fève fait partie des symboles du solstice d'hiver. C'est le premier légume qui pousse au printemps. Surtout, ce légume, comme l'oeuf, contient un embryon. En "vieillissant", il donne la vie.

feve.jpgLa fève est donc symbole de fécondité. Au Moyen-Age, celui qui trouvait la fève dans la galette devait normalement payer sa tournée à la tablée. Certains prétendent que les plus avares avalaient la fève afin de ne pas débourser d'argent. C'est ainsi que serait née la fève en porcelaine, pour que le "roi" ne soit pas tenté de l'avaler.

Sources : Le Télégramme

19:23 Publié dans Actualité, Histoire insolite | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : galette des rois, tradition | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook |

15/11/2017

EVRY 16 NOVEMBRE 1943 ARRESTATION DE MISSAK MANOUCHIAN ET DE JOSEPH EPSTEIN

Manouchian3.jpg

Cet évènement est en fait l’épisode terminal de trois filatures.

La première avait visé, en janvier 1943, l’organisation politique de la jeunesse juive et le filet s’était refermé le 18 mars sur 57 jeunes gens qui furent déportés. Parmi eux, le futur syndicaliste, Henri Krasucki.

Une deuxième filature aboutira, en juin 1944 à l’arrestation de la plupart des membres du 2 ème détachement de la FTP-MOI, dit aussi détachement juif. Sur plus de 150 militants filés, 71 seront arrêtés et eux aussi en grande partie déportés.

Quant à la troisième filature, qui s’acheva ici-même, elle sera le fait de la Brigade spéciale et durera cent jours pour permettre l’arrestation de 68 militants de la FTP-MOI sous la forme d’un vaste coup de filet.

Missak et Joseph se retrouvaient chaque mardi pour échanger des informations et la police le savait.

Ce mardi 16 novembre, le commissaire Barrachin est en personne sur le terrain, assisté de quatre inspecteurs.

Ils suivent Missak depuis la gare de Lyon et descendent tout comme lui à la petite gare d’Evry-Petit-Bourg. Quand Joseph aperçoit Missak, il commence à marcher en direction de la Seine. Ils se suivent à une cinquantaine de mètres. Joseph est convaincu d’être filé.

Il descend toutefois sur la berge, grasse et détrempée en ce mois de novembre, et Missak le suit. Lorsqu’il aperçoit les policiers, Joseph se met à courir. L’inspecteur Chouffot tire alors à plusieurs reprises et finit par le neutraliser en le menottant, malgré une forte résistance. Et c’est bientôt le tour Missak : il ne fera pas usage du 6.35 qu’il cachait dans son manteau et se rendra à la 2 ème sommation.

Les 68 personnes arrêtées seront remises par les policiers français aux autorités d’occupation. 45 d’entre elles seront déportées en Allemagne. Pour les autres, un procès se tiendra le 16 février 1944 devant une cour martiale.

Les 22 participants seront condamnés à mort et fusillés le 21 février au Mont Valérien. Joseph Epstein le sera à son tour le 11 avril.

La seule femme du groupe, Olga Bancic, sera quant à elle déportée en Allemagne où elle subira la décapitation le 10 mai 1944.

Avant d’être fusillés, certains militants de la FTP-MOI purent écrire une courte missive à leur famille.

En voici quelques extraits pour le moins émouvants :

«Je voudrais que mon fils ait une belle instruction». Celestino Alfonso, fusillé à 28 ans.

«Il n’est rien de plus beau que de mourir pour la France». Georges Cloarec fusillé à 21 ans.

«Je n’ai jamais manqué de rien et vous avez toujours été pour moi le Paradis, c’est pourquoi j’ai sacrifié ma vie…j’embrasse tout Argenteuil du commencement à la fin…envoie le bonjour et l’adieu à tout le Red Star». Rino Delle Negra, fusillé à 21 ans.

«Vous ne devez pas vous attrister mais être gais au contraire, car pour vous viennent les lendemains qui chantent». Thomas Elek, fusillé à 19 ans.

«Je vous écris ces derniers mots de ma main pour vous dire mes adieux à la vie que je voulais plus belle qu’elle n’a été». Maurice Fingercwejg, fusillé à 21 ans.

«Je m’étais engagé dans l’armée de la libération et je meurs quand la victoire éclate…Je garde le maillot de papa pour que le froid ne me fasse pas trembler ». Spartaco Fontano, fusillé à 22 ans.

«Je n’ai pas peur de mourir. Je trouve quand même que c’est un peu trop tôt. Comme cadeau d’anniversaire, c’est réussi, n’est-ce pas ?...Vive la France. Léon Goldberg, fusillé à 20 ans.

«Jusqu’au dernier moment, je me conduirai comme il convient à un ouvrier juif;». Szlomo Grzywacz, fusillé à 35 ans.

«Je meurs pour la Liberté». Stanislas Kubacki, fusillé à 36 ans.

«J’aime tout le monde et vive la vie». Marcel Rayman, fusillé à 21 ans.

«Je meurs en soldat de la Libération et en Français patriote…Vive la France». Roger Rouxel, fusillé à 19 ans.

«Les derniers trois jours après ma condamnation, j’ai été avec deux jeunes Français ensemble et j’ai appris à aimer le France davantage». Willy Szapiro, fusillé à 34 ans.

«Bientôt la vie sera plus belle ». Robert Witchitz, fusillé à 20 ans.

«Bonheur à ceux qui vont nous survivre et goûter à la douceur de la Liberté et de la Paix de demain». Missak Manouchian, fusillé à 38 ans.

Il y aura bien sûr aussi les poignants écrits de Missak à son épouse Mélinée et la si belle lettre de Joseph à son petit garçon.

Lettre d'Olga Bancic, décapitée à l’âge de 32 ans destinée à sa fille «Ma chère petite fille, mon cher petit amour, ta mère écrit la dernière lettre, ma chère petite, demain à 6 heures, le 10 mai, je ne serai plus. Mon amour, ne pleure pas, ta mère ne pleure pas non plus. Je meurs avec la conscience tranquille et avec toute la conviction que demain tu auras une vie et un avenir plus heureux que ta mère. Tu n’auras plus à souffrir. Sois fière de ta mère, mon petit amour. J’ai toujours ton image devant moi. Je vais croire que tu verras ton père, j’ai l’espérance que lui aura un autre sort. Dis-lui que j’ai toujours pensé à lui comme à toi. Je vous aime de tout mon cœur. Tous les deux vous m’êtes chers. Ma chère enfant, ton père est, pour toi, une mère aussi. Il t’aime beaucoup. Tu ne sentiras pas le manque de ta mère. Ma chère enfant, je finis ma lettre avec l’espérance que tu seras heureuse pour toute ta vie avec ton père, avec tout le monde. Je vous embrasse de tout mon cœur, beaucoup, beaucoup. Adieu mon amour. Ta mère.»

Jacques Longuet Historien d'Evry

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