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12/09/2024

FINLANDE, LA GUERRE AVEC HITLER, CONTRE L'URSS PENDANT LA DEUXIEME GUERRE MONDIALE

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Le 25 juin 1941, quatre jours après le début de l’opération « Barbarossa », les autorités d’Helsinki lançaient leur « guerre de Continuation » et rejoignaient le IIIe Reich contre l’Union soviétique. Pendant plus de trois ans, 530 000 soldats finlandais vont affronter un million de soldats de l’Armée rouge, avec Leningrad en ligne de mire.

Bernard Frederick l'Humanité

Il arrive que pour célébrer une victoire ou commémorer une guerre, une nation lui donne un nom : la guerre des Deux-Roses ; la guerre de Sécession ; la guerre des Boers ; la Grande Guerre, en France, pour le conflit de 1914-1918 ; la Grande guerre patriotique en URSS et en Russie pour le second conflit mondial… Les Finlandais nomment « guerre de Continuation » celle qui les vit affronter l’Armée rouge du 25 juin 1941 jusqu’au 19 septembre 1944, il y a quatre-vingts ans.

Guerre de Continuation ? Continuation de quoi ? En fait, dès le début de leur entrée en guerre contre l’Union soviétique, quatre jours après l’attaque par l’Allemagne de celle-ci par l’« opération Barbarossa », les autorités finlandaises cherchèrent à se disculper auprès de leurs anciens alliés, les Américains et les Britanniques, de leur nouvelle « fraternité d’armes » avec les nazis. Elles tentèrent d’expliquer à leur population échaudée par le précédent conflit avec leur grand voisin, et au-delà à ceux qui les avaient jusque-là soutenues, que leur pays avait pour seul objectif de récupérer les parties de leur territoire cédées à Moscou, sous la contrainte, en 1940, au terme de la courte guerre d’Hiver (30 novembre 1939-12 mars 1940)1.

« Nous menons maintenant une guerre avec l’Allemagne pour détruire le bolchevisme »

S’agissant de la guerre de Continuation, Helsinki parla d’ailleurs d’abord de « guerre d’été », tant il croyait au blitzkrieg allemand. En fait de blitzkrieg, on comprit vite que, malgré leurs immenses pertes, les Soviétiques résistaient avec force et bientôt contre-attaqueraient avec succès, à l’automne, infligeant aux troupes de l’Axe leur première et lourde défaite devant Moscou.

En conséquence, la Finlande a dû participer à la guerre contre l’Union soviétique aux côtés de l’Allemagne nazie pendant assez longtemps – trois ans et trois mois, du 25 juin 1941 au 19 septembre 1944 –, menant des opérations militaires dans la direction de Leningrad et en Carélie. Toute cette période de la guerre, de nature clairement agressive, a commencé à être appelée dans l’historiographie finlandaise, aussi paradoxal que cela puisse paraître, la « guerre de Continuation », c’est-à-dire la continuation de la « guerre d’Hiver » défensive de 1939-1940. L’intervalle entre les deux guerres – un an et trois mois – n’a été présenté dans l’histoire nationale que comme une « trêve ».

Officiellement, donc, il s’agissait de revenir à la frontière d’avant la « guerre d’Hiver », donc celle de 1939. Mais dès le mois d’août 1941, on commençait à affirmer, comme le principal journal finlandais « Helsingin Sanomat », le 9 septembre 1941, que c’était « Saint-Pétersbourg (sic) qui mena (çait) la sécurité de la Finlande ».

Déjà, lors d’une réunion parlementaire, 25 juin 1941, il fut déclaré : « Nous menons maintenant une guerre avec l’Allemagne pour détruire le bolchevisme »2, et le Centre d’information finlandais, qui opérait alors aux États-Unis, précisa clairement que « Leningrad ne restera (it) pas aux mains des Russes ».

Le pacte anti-Komintern

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L’offensive conjointe des Finlandais et des Allemands avança rapidement. Vyborg, abandonnée par les unités soviétiques le 29 août, est immédiatement occupée par les troupes finlandaises. Une semaine auparavant, le 23 août, le maréchal Mannerheim, qui dirigeait l’armée finlandaise, avait reçu une lettre du chef d’état-major du haut commandement allemand, le maréchal Wilhelm Keitel, dans laquelle il l’informait que les troupes allemandes, au lieu de prendre d’assaut Leningrad, l’encercleraient par le sud, et lui demandait de faire de même par le nord.

Helsinki en éprouva une certaine amertume. Un discours avait été préparé pour la radio finlandaise, qui devait être diffusé immédiatement après la prise de Leningrad. Traduit en suédois, il annonçait : « Pour la première fois de son histoire, la capitale russe autrefois si magnifique, située à proximité de nos frontières, est tombée. Cette nouvelle, comme prévu, a remonté le moral de tous les Finlandais. » Le 8 septembre 1941, le blocus militaire de la ville était effectif.

Le 27 septembre, Londres fit parvenir à Helsinki une note comminatoire : « Tant que la Finlande continuera à être une alliée de l’Allemagne, menant une guerre d’agression contre l’alliée de la Grande-Bretagne sur son territoire, le gouvernement royal sera contraint de considérer la Finlande comme membre de l’Axe, car il est impossible de séparer les actions militaires de ce bloc de la guerre que la Finlande mène contre la Russie. (…) Si le gouvernement finlandais estime qu’il est possible de continuer à mener une offensive sur le territoire purement russe, alors la Grande-Bretagne sera obligée de considérer la Finlande comme son ennemi. » Le 25 novembre 1941, la Finlande rejoignit officiellement le pacte anti-Komintern. Le ministre des Affaires étrangères Witting le signa à Berlin même. Les masques tombaient.

« Le retrait des Allemands de Leningrad est un grand malheur pour la Finlande »

Le 6 décembre la Grande-Bretagne déclara la guerre à la Finlande ; les États-Unis s’en abstinrent. En réalité, les hostilités entre la Grande-Bretagne et la Finlande n’ont jamais commencé et les dirigeants finlandais n’ont tiré aucune conclusion sérieuse, ni de la déclaration britannique ni de la situation militaire générale.

Mais la participation des troupes finlandaises au siège de Leningrad présentait une différence significative par rapport aux actions de l’armée allemande. Pendant tout ce siège – qui a coûté la vie à 800 000 habitants, morts principalement de faim et de froid –, les forces finlandaises se sont abstenues de la bombarder. Mais, lorsqu’en janvier 1944 les troupes des fronts de Leningrad et Volkhov repoussèrent les Allemands loin de la ville, le président finlandais Ryti déclara avec inquiétude, le 2 février 1944, lors de sa rencontre avec l’envoyé allemand Blucher : « Le retrait des Allemands de Leningrad est un grand malheur pour la Finlande. »

Dans les cercles gouvernementaux et militaires finlandais, on commença à se poser la question d’un accord avec l’Union soviétique. Moscou doutait cependant de la bonne volonté d’Helsinki. Les contacts secrets à Stockholm, en février 1944, entre le représentant finlandais K. Paasikivi et l’ambassadrice soviétique Alexandra Kollontaï3 n’offraient guère de perspectives.

Un rapprochement avec l’URSS ?

Le 1er mai 1944, le commandement des fronts de Leningrad et de Carélie reçut l’ordre du haut commandement suprême de commencer les préparatifs actifs d’une offensive contre l’armée finlandaise dans deux directions : Vyborg et Svir-Petrozavodsk. Le 9 juin à 8 heures du matin, l’artillerie et l’aviation du front de Leningrad et de la flotte baltique de la bannière rouge bombardèrent les lignes finnoises. Le 10 juin à 8 h 20, la 21e armée, après avoir traversé la rivière Sestra, avança de 5 à 15 km, bousculant les lignes fortifiées de l’ennemi.

Le 22 juin 1944, la direction finlandaise décida de faire appel à l’URSS, via Stockholm, pour mettre fin à la guerre. Le ministre allemand des Affaires étrangères, Ribbentrop, arriva soudainement à Helsinki dans le but d’empêcher la Finlande de conclure la paix avec l’Union soviétique. La Finlande, une fois de plus, s’inclina.

Conformément aux instructions du quartier général du haut commandement suprême, les troupes du front de Leningrad ont suspendu leur offensive le 11 juillet et celles du front carélien – à partir du 29 août 1944. À ce moment-là, la 21e armée avait légèrement avancé au nord et au nord-est de Vyborg et, en coopération avec la flotte baltique, capturé la baie des îles Vyborg. La sécurité de Leningrad étant désormais assurée, une partie des troupes du Front de Leningrad fut transférée dans les États baltes et en Biélorussie. C’était du point de vue soviétique un geste de bonne volonté.

La promesse à Hitler

Le président finlandais, Ryti, pour toute réponse, promit, dans un courrier à Hitler, qu’il ne permettrait à aucun gouvernement finlandais de négocier la paix sans son consentement. L’opposition « pacifique » finlandaise – constituée au départ de six députés sociaux-démocrates –, sortie de son mutisme, proposa alors que le commandant en chef des forces armées finlandaises, Mannerheim, remplace le président Ryti.

Sous la pression, celui-ci démissionna et Mannerheim arriva au pouvoir le 4 août 1944. Le 17 août, il déclara à Keitel, arrivé à Helsinki, qu’il ne se considérait pas lié par les obligations imposées par l’Allemagne à l’ancien président Ryti. Le 25 août, l’envoyé finlandais en Suède, Gripenberg, informa l’ambassadrice Kollontaï que la Finlande ne se considérait plus liée par l’accord avec l’Allemagne signé par Ryti.

La réponse du gouvernement soviétique fut transmise aux dirigeants finlandais par l’intermédiaire de Kollontaï le 29 août. Il exprimait son accord pour recevoir la délégation finlandaise à Moscou, à condition que la Finlande fasse une déclaration publique sur sa rupture avec l’Allemagne et que les troupes allemandes soient retirées du territoire finlandais avant le 15 septembre.

La Finlande se retire de la guerre

Le 2 septembre, lors d’une réunion à huis clos du Parlement finlandais, le gouvernement Hackzell a soulevé la question de la sortie du pays de la guerre. La majorité des députés soutint cette proposition. Le même jour, Mannerheim en a informé Hitler et il a été demandé à l’envoyé allemand à Helsinki, Blucher, ainsi qu’aux représentants militaires concernés, que les troupes allemandes quittent la Finlande dans un délai de deux semaines. Dans un discours radiophonique en fin de soirée, le premier ministre Hackzell a officiellement annoncé la décision parlementaire de se retirer de la guerre et l’exigence que les troupes allemandes quittent le pays.

Le 4 septembre, le gouvernement finlandais a officiellement déclaré son acceptation des conditions préliminaires de l’Union soviétique et le même jour, à 8 heures du matin, les troupes finlandaises ont cessé les hostilités. Le lendemain, l’ordre de cessation des hostilités avec la Finlande fut également transmis par le haut commandement suprême soviétique aux troupes des fronts de Leningrad et de Carélie. La guerre de Continuation a vu s’affronter 530 000 Finlandais et 220 000 Allemands à près d’un million de Soviétiques, et s’est soldée par la mort ou la disparition de 59 000 Finlandais (plus 2 000 civils tués) et 14 000 Allemands, et de 91 000 Soviétiques (plus 7 000 civils tués).

20:11 Publié dans Guerre, Occupation | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : finlande, urss, nazi, hitler | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook |

27/05/2023

LES BONS MOTS DE L'HISTOIRE / AMBROISE CROIZAT

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LES BONS MOTS DE L'HISTOIRE : AMBROISE CROIZAT « JAMAIS NOUS NE TOLERERONS QUE SOIT RENIE UN SEUL DES AVANTAGES DE LA SECURITE SOCIALE, NOUS DEFENDRONS A EN MOURIR ET AVEC LA DERNIERE ENERGIE, CETTE LOI HUMAINE ET DE PROGRES »

Ambroise Croizat, surnommé le ministre des travailleurs son nom est rattaché aux grandes lois relatives à la Sécurité Sociale. Epuisé par son incarcération pendant la seconde guerre mondiale en particulier dans le bagne d'Alger, et le travail considérable qu'il réalisa en deux ans comme ministre de la libération pour créer la Sécurité Sociale il prononça cette phrase lors de son dernier discours à l'Assemblée Nationale, le 24 octobre 1950 quelques semaines à peine avant sa mort à l'âge de 50 ans.

Avant l’ère industrielle, seule une minorité de travailleurs bénéficie d’un système de retraite, comme les marins (dès le XVIIe siècle) et les militaires. Au fil du XIXe siècle, alors que l’industrie a besoin de bras, des mesures sont créées dans certaines branches par les employeurs, les organisations ouvrières et l’État. Mais il faudra vraiment attendre 1945 pour que soient posées les bases du système actuel : régime général et retraites par répartition. En pleine guerre mondiale, en 1943, le Conseil National de la Résistance dans son programme les Jours Heureux avait fixé cette perspective.

Ambroise Croizat né en 1901 en Savoie, il est issu d’une famille d’ouvriers de la métallurgie et suit les traces de son père qui, en 1906, avait lancé une grève pour l’obtention d’une protection sociale. Il commence à travailler à l’âge de 13 ans, devient militant syndical puis député du Parti communiste à l’époque du Front populaire. Arrêté et emprisonné pendant la Seconde Guerre mondiale, Ambroise Croizat rejoint le gouvernement à la Libération, au poste de ministre du Travail entre novembre 1945 et mai 1947.

Avec son équipe et l’appui des organisations ouvrières, il met en oeuvre quelques-unes des plus importants acquis sociaux du XXe siècle : la Sécu, la médecine du travail, les allocations familiales, les comités d’entreprise, la formation professionnelle et bien sûr le système de retraites solidaires par répartition. Mais plutôt que d’acquis, Ambroise Croizat préférait que l’on parle de « conquis sociaux », parce que le combat fut rude et que rien n’est jamais gagné.

Le 17 février 1951, une foule immense estimé à un million de personnes descend dans la rue pour accompagner son cortège funéraire jusqu’au cimetière du Père-Lachaise. C’est un héros du peuple, l’homme qui au sortir de la Seconde Guerre mondiale, devenu ministre, s’est battu pour inventer et instituer le système de Sécurité sociale moderne.

Ambroise Croizat, Sécurité SocialeEXCLUSIF MOSAIK RADIOS ECOUTEZ EN PODCAST CET ARTICLE AVEC UNE INTERVENTION D'AMBROISE CROIZAT EXPLIQUANT LA MISE EN PLACE DE LA SECURITE SOCIALE EN CLIQUANT SUR CETTE LIGNE

 

07/05/2023

Espagne 1936-1939 : une « guerre civile » ?

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Ce concept de « guerre civile » peut se révéler, pour traiter de l’Espagne des années 1930, réducteur, voire instrumentalisable par « les vainqueurs », qui mettent l’accent sur une « égalité des responsabilités » dans la Guerre d’Espagne."

Jean Ortiz
L’expression « guerre civile » est en quelque sorte devenue, en Espagne, une facilité, une habitude de langage, que la plupart des historiens , y compris les plus progressistes, utilisent pour parler de la période 1936-1939. Tuñón de Lara, Espinosa, Moreno, Casanova, Viñas ... ne sont pas pour autant des « révisionnistes » et nous savons combien leurs travaux sont indispensables. Toutefois, ce concept de « guerre civile » peut se révéler, pour traiter de l’Espagne des années 1930, réducteur, voire instrumentalisable par « les vainqueurs », qui mettent l’accent sur une « égalité des responsabilités » dans la Guerre d’Espagne. Une façon aussi pour certains de ne pas reconnaître les crimes franquistes commis pour ce qu’ils sont, c’est-à-dire des crimes contre l’humanité. Donc imprescriptibles ; la plupart des grandes forces politiques espagnoles actuelles, les « libéraux » de droite et « de gauche », se retranchent derrière la fausse loi d’« amnistie » de 1977 (bourreaux et victimes « équidistants ») pour refuser d’ouvrir le procès, qui n’a pas encore eu vraiment lieu, du franquisme, et sanctuariser une monarchie imposée, donc illégitime.
 
On sait qu’une tendance lourde de l’historiographie actuelle sur la guerre d’Espagne consiste à renvoyer dos-à-dos « terreur rouge » et « terreur noire », fascistes et Républicains. Les « deux camps » seraient « tous coupables », d’où la notion frelatée, perverse, « d’ équilibre de la mémoire ». En criminalisant l’adversaire, on rend de fait plus dure et paradoxelemnt plus acceptable aussi la répression (ici l’anéantissement) et en quelque sorte on la légitime . On retrouve ces tactiques à l’œuvre dans les conflits actuels.
 
Pourquoi nous sommes réticents à parler de « guerre civile ? Dans une grande partie de l’Espagne, ce qu’il est convenu d’appeler « guerre civile » englobe plusieurs éléments : des révolutions sociales localisées (surtout en Catalogne, Aragon, Andalousie ), le premier affrontement  démocratie / fascisme, une guerre « internationale », une guerre de classe, une répression « exemplaire »... Le violentissime « golpe » (coup d’Etat) permit aux factieux d’appliquer très vite un « plan d’extermination » . En premier lieu du prolétariat urbain et rural. Pour les franquistes, il ne s’agissait pas seulement de gagner la guerre mais d’éradiquer, pour l’éternité, « le marxisme », la « révolution », considérés aussi comme des maladies à « nettoyer », à « épurer ». Les villes et les régions rurales de l’intérieur furent ravagées, essentiellement par les troupes coloniales, aguerries, féroces, que Franco fit atterrir en Andalousie et qui remontèrent vers Madrid en « colonne de la mort », pratiquant la stratégie de la « terre brûlée », l’écrasement de toute arrière-garde. D’où une « épuration » féroce. Des ondes de « Radio Séville », le chef factieux Queipo de Llano appelait chaque soir les légionnaires, les « coloniaux », à « se comporter en vrais mâles, pas des (...) comme les républicains, à violer les femmes « rouges» pour défendre « la race ». Les fascistes menaient une « croisade », une guerre de libération contre « les rouges » : le mal absolu. D’ailleurs, les cartes des fosses communes coïncident le plus souvent avec les bastions républicains, les endroits qui résistèrent le plus...
 
Comment dormir apaisé lorsque, par exemple, l’on est Cordouan et que l’on sait que dans les deux grands cimetières de la ville gisent encore plus 4000 corps de républicains « disparus », fusillés par les putschistes et jetés, entassés dans des « fosses du silence ».
 
« Nous avons décidé de ne pas parler du passé », confia au journal « El País » du 20 avril 2001, Felipe Gonzalez, l’ex-chef des gouvernements « démocratiques » de l’après-Franco (14 ans). Dans ces années-là, son numéro deux, Alfonso Guerra,  qualifiait le travail de mémoire de « poussiéreux », de « pure archéologie ». Le 20 novembre 2002, le Congrès espagnol adopta une motion minimaliste qui condamnait du bout du bout des lèvres, le franquisme sans mentionner le coup d’Etat militaire, et en réduisant la Guerre à un « affrontement civil entre les Espagnols ». Depuis, l’investissement mémoriel de nombreuses associations a contribué à une sorte de « retour de mémoire ». Et ce, plus particulièrement à partir 1996.
 
Les gouvernements socialistes ont beaucoup participé à la perte de mémoire, par calcul politique, pour préserver entre autres la monarchie, alors que le moment était opportun pour mener une offensive mémorielle sur la République et la Guerre, pour que recule le révisionnisme. Et « récupérer » au passage ( !) des valeurs que Franco pensait avoir enfouies à tout jamais. Et cela dure encore... Le PSOE a lâché la République. Mais le procès du franquisme reste à réaliser. Le 27 12 2007, un texte du gouvernement Zapatero, la loi 52 /2007, se posait faussement en « loi de mémoire », sans toutefois répondre véritablement aux enjeux. Aucun de ses articles ne comporte le mot « République » ; elle ne porte pas une condamnation claire du franquisme, etc. Le parti populaire n’en a même pas profité pour se démarquer (« desvincularse ») du franquisme, dont il est l’héritier politique. Il assume.
 
Le 20 novembre 2008, José Luis Zapatero, au palais de la Moncloa, plaida pour l’oubli, tout en ajoutant : « bien qu’il y ait des gens plus enclins à oublier que d’autres ». D’où la tentation de botter en touche sur l’aide aux associations de récupération de la mémoire historique. Le PP, lui, là où il gouverne n’a pas accordé (à ma connaissance) la moindre subvention conséquente pour l’exhumation des fosses communes. Il faut des géologues, des archéologues, des médecins légistes ; des avocats, des tests ADN... Tout cela a un prix : le prix de la justice, de la vérité, de la mémoire. Alors, prenons garde au révisionnisme sémantique... Ne nous laissons voler ni les maux, ni les mots.

18:48 Publié dans Espagne, Occupation | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : espagne, guerre | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook |