09/05/2016
La Marseillaise de Renoir
Lorsque retentit la Marseillaise chantée à pleins poumons par une armée de bric et de broc qui monte à Paris défendre « la patrie en danger », on a du mal à retenir ses larmes. Ce chant n’est pas encore l’hymne national. Il s’appelle le Chant de marche des volontaires de l’armée du Rhin. Bomier, maçon de son état, est de ceux-là. La première fois qu’il l’entend, il est persuadé que nul ne retiendra l’air ni les paroles. Avec une mauvaise foi absolue, il niera devant ses camarades avoir jamais dit ça. Tous éclatent de rire. Nous aussi.
Ce chef-d’œuvre tourné en 1936 et qui sortira sur les écrans en 1938. C’est le 22e film de Renoir. Entièrement financé par une souscription lancée par la CGT sous forme d’assignats. L’élan qui entoure le film est impressionnant. Trois mille figurants, tous membres de la CGT. L’ensemble des ouvriers et des techniciens sont affiliés sans exception au tout jeune Syndicat général des travailleurs de l’industrie du film CGT.
La France des privilèges est contestée dans tout le pays
Au générique, beaucoup d’acteurs de renom. Dont Carette et Louis Jouvet. Le film a été tourné dans les studios de Billancourt. Très peu d’extérieurs. Bonnier, Cabri, Ardisson, les trois figures que l’on suit tout au long du film, se rencontrent dans la garrigue où ils ont trouvé refuge. Cabri risque les galères pour braconnage.
La France des privilèges est contestée dans tout le pays. Les cahiers de doléances circulent. Le film démarre à cet endroit-là. Renoir, « le Patron », comme on le surnomme dans la profession, sait ce qu’il veut : réaliser une fresque sur la Révolution française dans le contexte politique et social en pleine effervescence du Front populaire. Il tient son début. « Ça commence comme un film de Pagnol, ça se finit comme un film de John Ford », raconte Tanguy Péron, historien du cinéma.
C’est juste. La garrigue, l’accent marseillais qui se frotte à l’accent pointu, les fanfaronnades, les discussions dans les assemblées citoyennes, mais aussi la fraternité, la générosité face à la noblesse française qui préfère s’allier aux Prussiens contre la République (on songe au « plutôt Hitler que le Front populaire »), le sens de l’honneur chez les plus humbles, celui du déshonneur de l’aristocratie réfugiée à Coblence, tout est là, dans ce premier film républicain sur la Révolution française. Dont l’épisode final raconte la victoire de Valmy et la prise des Tuileries.
Le tournage du film est plus long que prévu. La Marseillaise aurait dû être prêt pour l’Exposition universelle de 1937. L’argent manque. Le contexte politique se dégrade. En Espagne, la République est attaquée, bombardée. En France, les militants communistes collectent désormais pour elle après que le gouvernement se soit retranché derrière la non-intervention. Le fascisme frappe à toutes les portes.
En Allemagne, en Italie, en Espagne. Renoir tient bon. La CGT aussi qui poursuit le financement du film. Des associations juives antifascistes américaines lèvent des fonds. On dit que le Kominterm aussi aurait envoyé de l’argent. À l’origine, le film devait coûter 8 millions de francs. La facture s’élèvera à 18 millions. Lorsqu’il est projeté pour la première fois le 2 février 1938 à l’Olympia, il est mal accueilli. Le Front populaire n’est plus. L’imminence d’une invasion hitlérienne plane en Europe…
Quand Renoir filme la Marseillaise , il pense Front populaire
« La nation, c’est la réunion fraternelle de tous les Français », explique Ardisson à un officier de l’armée. Chaque réplique du film, chaque symbole, chaque acte résonnent avec acuité encore aujourd’hui. Plus que jamais. Quand Renoir filme la Marseillaise, il pense Front populaire. Quand nous regardons ce film aujourd’hui, on pense à tous ces détournements de l’Histoire, à tous ces brouillages qui viennent parasiter les discours politiques. À tous ces mensonges. La Marseillaise est un chant révolutionnaire.
Le hold-up opéré par la bande à Le Pen est une insulte aux révolutionnaires de 1789. Mais aussi aux résistants qui tombaient sous les balles nazies en chantant la Marseillaise. La fonction pédagogique du film est évidente. Allier un geste artistique à la volonté d’instruire le peuple, non pour le guider mais qu’il devienne libre, est un acte fort. La générosité, la fraternité, la liberté sont bien plus que des concepts : dans le film, les personnages en font l’apprentissage, et c’est remarquable. Chez Renoir, le désordre est du côté des ligues factieuses (les monarchistes).
L’ordre du côté du peuple. Mais c’est l’idée d’union (ouvriers, paysans, artisans, intellectuels, Marseillais, Bretons ou Auvergnats) face aux détenteurs des privilèges qui est le fil conducteur du film. Quelques mois après la sortie du film, la France signe les accords de Munich sous les applaudissements des tenants de l’ordre bourgeois. On trouve a posteriori des indices dans le film de Renoir comme autant de fulgurances visionnaires d’un artiste en phase avec son époque.
12:53 Publié dans Cinéma, L'Humanité, Révolution | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : la marseillaise, jean renoir, cgt | |
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14/04/2016
CHANSONS ROUGES MOSAIK RADIO
Nouvelle radio qui remplace la totalité des radios du groupe Mosaik Radios (Chansons Rouges, Mosaik Radio, Classik Radio) pour permettre une meilleure unicité et écoute.
Elle est diffusée sans publicité et permet des programmations plus importantes et plus diverses sans contraintes d'horaires et d'audimat.
Elle donne la priorité à la musique et à l'information en diffusant tous les jours douze magazines d'actualités politiques, sociales, culturelles, éducatives, sportives, musicales et 16 flashs d'informations générales
MAGAZINE HISTOIRE : LA COMMUNE DE PARIS
La Commune de Paris période insurrectionnelle de l'histoire de Paris dura un peu plus de deux mois, du à la « Semaine sanglante » du 21 au 28 mai 1871.
Le magazine Histoire de la Radio Chanson Rouge Mosaik Radio pendant tout le mois d'avril diffusé le jeudi à 15h et le dimanche à 20h sera consacré à cet évènement avec Henri Guillemin qui a consacré une conférence sur la Commune de Paris. Au mois de mai l'intégralité de cette conférence vous sera proposé dans le cadre du magazine Panorama diffusé le dimanche à 15h et le jeudi à 20h.
LA GRILLE DE DIFFUSION
- Programme musical de chansons rouges, rebelles et révolutionnaires de France et du Monde entier en continu
L'INFORMATION
-Magazines d'informations du matin à 7h, 8h, 9h, 13h (flash, météo, sport, éphéméride, programmes TV, horoscope, magazines, chroniques)
-Magazines d'informations du soir à 17h et 19h
-Flash d'informations toutes les heures de 6h à 22h (sauf 21h)
-Le TOP 8h du matin magazine, 8h-8h30 (flash, édito, chroniques, magazine, reportages, rubriques diverses)
-Le TOP midi magazine , 12h-12h30 (flash, édito, chroniques, magazine, reportages, rubriques diverses)
-Le TOP 18h magazine , 18h-18h30 (flash, édito, chronique, magazine, reportage, rubriques diverses)
PLUS BELLES LES LUTTES, le lundi à 20h, émission proposée par les militants CGT des Bouches du Rhone
MAGAZINES THEMATIQUES 10H, 15H, 20H, 22H
Lundi : 10H : Entretiens avec des chanteurs et nouveautés musicales, 15H : Découverte recettes cuisine, 20H : Plus belles les luttes, 22H : Découverte Jazz
Mardi : 10H : Reportages, 15H : Découverte musique classique, 20H : Fréquence Terre
Mercredi : 10H - Cinéma, 15H : Hits rire des années 50 et 60, 20H : Reportages et débats, 22H : Découverte musique country
Jeudi : 10H : Découverte musique Jazz, 15H : Histoire, 20H : Panorama (conférences)
Vendredi : 10H : Découverte musique country, 15H : Cinéma, 20H : magazine cuisine, 22H : Hits et rire des années 1950-1960
Samedi : 10H - Fréquence Terre magazine de l'écologie, 15H - Entretiens avec des chanteurs, nouveautés musicales, 20H : Magazine cinéma
Dimanche : 1OH : Découverte musique classique, 15H : Panorama (conférences), 20H : Magazine Histoire, 22H : Découverte musique classique
LES SPÉCIALES :
TOUS EN BOITE DE 00H00 A 6H00 DU MATIN LE SAMEDI ET LE DIMANCHE - NUIT DISCO
17:43 Publié dans Actualité, Châteaux, Cinéma, Colonies, Culture, Déportation, Deuxième guerre mondiale, Guerre d'Espagne, La Commune, Libération, Moyen âge, Musique, Occupation, Politique, Première guerre mondiale, Résistance, Révolution, Russie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chansons rouges mosaik radio, histoire, la commune de paris | |
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30/03/2016
Robespierre, objet de passion, interroge toujours les consciences
Robespierre. La Fabrique d’un monstre, Jean-Clément Martin. L’historien livre une biographie de l’Incorruptible totalement dégagée de l’emprise thermidorienne. En refusant de se soumettre aux injonctions du psychologique, de l’affectif, de l’exaltation comme de la vitupération, il fait œuvre utile et salutaire.
En moins de quinze ans, indépendamment des deux rééditions successives des dix volumes des Œuvres de Maximilien Robespierre, augmentés d’un onzième volume, suivies de la « découverte » de papiers jusque-là considérés comme perdus, ont paru autant de biographies de l’Incorruptible qu’il en a été dénombrées depuis les premiers travaux dus à Laponneraye, dans les années 1830 ! C’est assez dire que le personnage historique de Robespierre ne cesse de focaliser l’intérêt du public et d’interroger les consciences.
En se consacrant à dire simplement ce que fut l’existence de Maximilien Robespierre, de sa naissance à Arras en 1758 à sa mort tragique le 28 juillet 1794 (le 9 thermidor), tout en refusant de se soumettre aux injonctions du psychologique, de l’affectif, de l’exaltation comme de la vitupération, Jean-Clément Martin a fait œuvre utile et salutaire. Dans les cent premières pages, il évoque précisément le jeune homme que fut Maximilien, circonscrit fort bien son milieu de bourgeoisie d’office par son père et, du côté maternel, signale sa position de rejeton d’une dynastie de producteurs urbains, rappelle ses réussites scolaires, son insertion relativement aisée dans le milieu arrageois, son attention insolite à la situation sociale des petites gens du tiers état : rien de très « original » ne distingue donc Maximilien de beaucoup d’autres qui seront appelés à tenir les premiers rôles dans la Révolution qui vient.
« Idole abattue », « bouc émissaire » de la peur bourgeoise
Pendant les cent vingt pages qui suivent, on suit pas à pas le cheminement d’un représentant du peuple que la Révolution éduque plus qu’il ne la dirige, découvrant à la fois les risques de l’action politique et la nécessité de l’engagement, l’écart entre les paroles qu’il faut prononcer (ou ne pas formuler) et l’effet du discours ou de la posture sur l’événement autant que sur les mouvements de l’opinion et l’action collective des forces sociales. Puis, en cent pages supplémentaires, l’auteur nous entraîne derrière Robespierre dans les arcanes du pouvoir d’État, d’abord dans sa définition et sa conquête, ensuite dans son exercice : c’est alors que l’homme de principes se révèle, à la mesure des enjeux et des circonstances qui s’imposent à lui.
Sorti vaincu d’un affrontement politique sur fond de guerre civile et étrangère, qu’il a vue venir sans pouvoir en maîtriser le cours malgré son immense autorité publique, Robespierre devient une « idole abattue » que ses vainqueurs, issus pour la plupart du même cursus historico-politique, transformeront délibérément en « monstre » après sa chute pour inscrire à son débit d’homme d’État tout ce qu’il fallait faire oublier ou occulter de la Révolution, une fois celle-ci « terminée ». Et c’est sur cette figure de Robespierre en « bouc émissaire » de la peur bourgeoise et en première incarnation de la catégorie de « totalitarisme » inventée par Hannah Arendt, « entre Platon et Pol Pot », que s’achève l’ouvrage.
On ne saurait trop louer l’auteur d’avoir systématiquement replacé l’action et la parole de Robespierre dans le contexte précis de leur formulation et d’en mesurer l’efficace ou l’effet à cette aune exclusivement. Ici gît toujours l’honneur de l’historien ! Cela nous change des élucubrations des multiples auteurs thermidorisés, même sans le savoir, qui en ont traité. Mais la démarche de Jean-Clément Martin se montre de surcroît surtout attentive aux relations de sommet, et même au tour « politicien (sic) » des choses, aux intérêts de « clans », et rabat quelquefois la grande histoire de la nation refondée entre 1789 et 1793 sur de petits motifs, loin des grands enjeux du temps : on se prend quelquefois à souhaiter d’entendre Goethe ou Victor Hugo, même Chateaubriand et pas seulement Carlyle (in fine).
Un ouvrage original et argumenté qui réjouira les robespierristes
D’autant que la haute culture de Robespierre (que les thermidoriens se sont ingéniés à occulter), notamment son constant retour sur ce qu’il fallait retenir de Jean-Jacques Rousseau, voire de Montesquieu, n’apparaît souvent que sous la forme d’un alibi, d’un topo ou d’un simple souvenir de collège, non d’une pensée en acte. On pouvait espérer plus de grandeur dans le rendu, comme on le dit d’un tableau. Traduisant la mauvaise conscience de la suite des générations qui se sont laissé duper, volontairement ou non, par le discours thermidorien, l’effort de salubrité historienne auquel s’est attaché Jean-Clément Martin dans ce livre si argumenté ne va certes pas, du côté droit de l’opinion, améliorer son image et sa réputation d’électron libre ! Seuls celles et ceux qui n’ont pas lu ses précédents ouvrages en seront surpris. Nous, robespierristes, nous en réjouissons.
Quoique ne reposant pas sur des découvertes documentaires nouvelles, la biographie de Jean-Clément Martin est un très bon livre, original et tout à fait à la page, qui sait d’ailleurs rendre aux précédents travaux ce qui leur revient. On se plaît à constater, ce qui est rare, que la bibliographie utilisée et la liste des auteurs cités, à quelques curieuses exceptions près, ne jettent l’ostracisme sur personne (le récit d’André Stil, qui le mérite, est mentionné quatre fois et longuement), mais curieusement, beaucoup de celles et ceux qui sont cités dans les pages du texte sont ignorés dans l’index terminal, de même que, à l’exception d’un seul, tous les différents auteurs de recueils de textes de Robespierre : le diable, comme l’on sait, niche toujours dans les marges !
11:17 Publié dans Biographie, Révolution | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : robespierre, la fabrique d'un monstre, livre, mazauric, jean clément perrin | |
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