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03/01/2015

Des enfants dans les mines

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3 janvier 1813 : Décret interdisant de faire aller aux mines des enfants de moins de 10 ans.

Pendant longtemps, jusque vers 1880, les enfants ont travaillé dans les mines. Leur petite taille leur permettait de se glisser dans les galeries les plus étroites. Ils poussaient des wagonnets remplis de charbon, au risque de se faire écraser quand, à bout de force, ils ne pouvaient plus retenir la lourde charge.

Ils subissaient les mêmes risques que les adultes et vivaient dans des conditions effroyables, parfois dès l'âge de six ans. C'est ainsi qu'à Béthune, en 1861, lors d'un accident dans la mine, sur dix-huit morts, on compta sept enfants dont certains avaient juste neuf ans.

Des journées de 15 heures

Les conditions de travail sont très pénibles pour tous. Beaucoup d'enfants font partie d'équipes d'adultes ; ils sont soumis aux mêmes horaires et ne sont pas mieux traités.

Dans les mines de charbon, " la durée de travail est habituellement de onze à douze heures ; elle va jusqu'à quatorze heures et, très fréquemment, on fait une double journée, si bien que l'ensemble des travailleurs reste sous terre en activité vingt-quatre, assez souvent même, trente-six heures à la suite."

A l'usine dès l'âge de 8 ans

Au XIX ème siècle, les usines étant de plus en plus mécanisées, de nombreux postes de travail sont occupés par des manœuvres sans qualification. dès l'âge de 8 ou 9 ans, les enfants sont employés à ces travaux qu'aucune machine ne peut exécuter à cette époque. Les patrons encouragent le travail des enfants.

Leur habilité et leur petite taille sont bien utiles pour certaines tâches. Et surtout, un adulte effectuant un travail similaire doit être payé trois à quatre fois plus. Bien souvent, comme leurs salaires ne sont pas suffisant pour vivre, les parents eux-mêmes font embaucher leurs enfants par l'usine.

 

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11:00 Publié dans Monde, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : enfants, travail | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook |

13/12/2014

Ces femmes au service de la France en 14-18

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Durant la Première Guerre mondiale, les femmes ne se sont pas contentées d’être des mères et des épouses affectueuses et soucieuses de renforcer le moral de leur mari ou de leur(s) fils au front.

Devenues chefs de famille, elles se sont aussi mobilisées, ont participé à l’effort de guerre, qu’elles aient été paysannes ou ouvrières. Plusieurs d’entre elles ont apporté un soutien direct à l’armée comme infirmières, espionnes, « marraines de guerre » ou comédiennes. Nombreuses ont été les veuves.

LES PAYSANNES, « GARDIENNES DU TERRITOIRE NATIONAL »
Dès l’été 1914, les femmes remplacent les hommes partis au front. Elles permettent ainsi de nourrir les civils et les soldats. Les paysannes, « gardiennes du territoire national », comme le romancier Ernest Pérochon les surnommera en 1924, sont les premières sollicitées pour contribuer à cet effort. Le président du Conseil René Viviani les appelle, dès le début du conflit, à achever les moissons et à ne pas oublier les travaux de l’automne.

En plus d’assurer le quotidien de la ferme, elles se consacrent à la culture des champs. Bien qu’aidées par les personnes âgées et les enfants, elles dirigent les exploitations dans bien des cas aux limites du surmenage et de l’épuisement. Les travaux agricoles, auxquels elles n’ont pas été préparées, exigent une grande force physique. Les chevaux sont réquisitionnés pour le front et on voit des femmes se mettre à plusieurs pour tirer elles-mêmes une charrue.

À cela s’ajoute le poids de l’éloignement du mari ou du (des) fils. Les paysans sont envoyés prioritairement au front, les ouvriers et les employés étant affectés plutôt à des missions de soutien de l’armée. Les paysannes sont donc confrontées plus que les autres femmes au veuvage. Dans une France encore rurale, elles sont, en 1914, 3,2 millions agricultrices, ouvrières agricoles ou femmes d’exploitants.

LES OUVRIÈRES, DE LA CONFECTION À L’ARMEMENT
La mobilisation en 1914 entraîne une baisse de 20 % des effectifs de la main-d’œuvre masculine dans les usines. Les femmes travaillent déjà dans les ateliers de confection, notamment pour coudre des vêtements pour l’armée. On les trouve aussi dans les conserveries, les chocolateries et – à hauteur de 7 % – dans la métallurgie.

Après les premières semaines de guerre, au vu entre autres des faiblesses de l’artillerie française, il est décidé de développer la production d’armements, en particulier celle d’obus. Attirées par de meilleurs salaires (45 à 47 centimes de l’heure contre 40 ailleurs), les femmes sollicitent de plus en plus des postes dans les usines de la défense nationale. Mais il faut plusieurs circulaires du ministre de la guerre pour qu’elles soient davantage recrutées dans ce secteur.

À partir de juillet 1916, l’emploi des femmes y est déclaré prioritaire. Les ouvrières en usine d’armement travaillent dix heures par jour dans de mauvaises conditions, les lois sur l’insalubrité des locaux ayant été suspendues en 1915. Elles sont au contact de fumées toxiques, de gaz, de produits corrosifs et de machines coupantes utilisées sans gants.

Elles sont très nombreuses à participer, en 1917, aux grèves et aux manifestations lancées par leurs consœurs de la confection pour obtenir une augmentation des salaires et le retour des maris partis au front. Dès la fin de la guerre, les usines d’armement ferment et les femmes sont renvoyées dans leur foyer avec une maigre indemnité.

LES ESPIONNES, SOLDATS SANS ARMES
« En France, il a été parfois reproché par les soldats aux femmes de n’avoir pas su se mobiliser pour faire la guerre en 1914. Mais quand elles en ont accepté l’idée, aucune offre ne leur a été faite d’entrer dans l’armée », affirme l’historienne Chantal Antier. Elles sont ainsi plusieurs à demander, dès le début du conflit, la création d’un « service auxiliaire » féminin de la défense nationale. Un refus leur est opposé.

Des femmes vont cependant trouver une occasion de participer à une autre forme de combat en s’engageant comme espionnes. Bien que mené sans arme à feu, l’espionnage est très dangereux et peut entraîner le sacrifice de sa vie, comme l’a montré le destin tragique de la catholique lilloise Louise de Bettignies, morte dans un bagne allemand en septembre 1918, après avoir animé un vaste réseau depuis les territoires occupés du nord de la France et de la Belgique.

De part et d’autre du front, il est donc fait appel à des femmes, souvent polyglottes, pour devenir espionnes à partir de 1915. Les commandements veulent remplacer les hommes espions, plus facilement repérables que les femmes. Elles ne font pas l’unanimité dans l’opinion française, compte tenu des méthodes de séduction auxquelles quelques espionnes, comme Mata-Hari, ont recours.

Hormis ces quelques cas, les femmes espionnes ont, après avoir été formées par les services secrets, fait preuve d’un redoutable professionnalisme. Pour la France, on peut notamment citer Mathilde Lebrun, veuve, mère de trois enfants et agent double au service de la France, ainsi que Louise Thuliez ou Henriette Moriamé.

LES INFIRMIÈRES, CONSOLATRICES DES BLESSÉS
femme,première mondiale,ouvrière,paysanneLes personnels de santé ont rarement vu une telle accumulation d’horribles blessures et de corps fracassés que durant la Grande Guerre (1 697 800 morts militaires et civils et 4 266 000 blessés pour la seule France). Du côté français, au début du conflit, les structures militaires de santé sont légères. Comme on pense que la guerre sera brève, aucun hôpital n’a été prévu près de la frontière à l’est et au nord. Les régiments ne peuvent compter que sur les médecins et les unités d’infirmiers qui leur sont attachés.

Les autorités corrigent rapidement la situation. Les hôpitaux de campagne se multiplient le long de la ligne de front à partir du début de 1915. À l’intérieur du pays, beaucoup d’hôpitaux se créent. Un grand nombre d’infirmières sont engagées après une formation accélérée. Les candidates abondent. Parmi les premières à se porter volontaire: 1 000 religieuses, qui avaient été chassées des services hospitaliers après 1905 et qui sont rappelées. La Croix‑Rouge française forme 7 000 bénévoles.

Ces effectifs sont renforcés par des infirmières venues d’Angleterre, des États-Unis et du Canada. Outre les soins donnés dans des conditions pénibles, les infirmières apportent, comme des Poilus l’ont raconté dans leurs témoignages, la douceur qui console des hommes torturés par d’extrêmes douleurs. En reconnaissance, plusieurs d’entre elles sont décorées de la Croix de guerre et de la Légion d’honneur.

LES VEUVES, UNE DIFFICILE RECONNAISSANCE
« Honneur aux femmes qui cherchent sur les champs de bataille la tombe de leurs maris… » Lors d’un discours prononcé après le 11 novembre 1918 en hommage aux héros de la guerre, le président de la République Raymond Poincaré n’a pas oublié les veuves. Elles sont 600 000. L’hommage présidentiel vise à consoler des femmes qui, en plus du malheur qui les accable, doivent multiplier les démarches pour faire reconnaître leur veuvage. L’annonce officielle de la mort du mari soldat n’intervient que plusieurs mois après. Il est vrai qu’il y a aussi beaucoup de tués non identifiables.

Les veuves se mettent en quête du corps de leur mari en se rendant dans les cimetières du front pour avoir accès aux fosses communes – mais cela n’est plus possible à partir de 1919 – ou en fouillant les champs de bataille. Pour avoir droit à la pension de veuve de guerre, la loi (votée en 1916) précise que le mari doit être tombé au front. Impossible, donc, de se prévaloir d’une disparition. Les cas de concubins ou fiancés ne sont pas non plus pris en compte.

La pension des veuves est de 800 francs par an, avec 500 francs supplémentaires par enfant mineur. Après la guerre, alors qu’il est demandé aux femmes de laisser les emplois aux hommes revenus du front, cette somme est jugée insuffisante par les concernées. Les associations de veuves protestent contre « une absence de véritable statut » dans la loi, qui leur retire la pension en cas de remariage. En 2007, l’historienne Stéphanie Petit a établi que 42 % des veuves de 14-18 se sont ensuite remariées (1).

LES « MARRAINES DE GUERRE », SOLIDAIRES DES POILUS
Les femmes manifestent, dès le début de la guerre, un grand élan de solidarité avec les soldats, dicté à la fois par la compassion et le patriotisme. Il prend plusieurs formes. Outre les infirmières qui s’engagent par milliers au front ou à l’arrière, se crée un vaste réseau féminin de soutien des poilus: celui des « marraines de guerre », initiative spécifique des Françaises, encouragée par les autorités dans un premier temps. La marraine entretient une correspondance avec le « filleul », qui est en principe choisi avec l’accord de l’officier commandant de l’unité.

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 Elle lui envoie des colis de denrées et, à partir de 1916, peut même le recevoir en permission dans sa famille. La presse passe des petites annonces de femmes et de soldats. Les autorités finissent par craindre que l’espionnage ne profite du phénomène. Ce mouvement, promu par Madeleine Clemenceau-Jacquemaire, fille de Georges Clemenceau, n’en concourt pas moins à la consolidation du moral des troupes en venant notamment en aide à de jeunes soldats sans attaches et à ceux des régions envahies. Les institutrices se révèlent des marraines très actives: elles connaissent l’art d’écrire des lettres et font adopter des filleuls par leurs élèves.

Cet engouement patriotique est aussi partagé par les stars féminines de la scène, qui participe à la distraction des soldats au front dans le cadre du Théâtre aux armées, fondé par le peintre Georges Scott. Parmi elles: Sarah Bernhardt, Béatrix Dussane ou Musidora.

Portraits rédigés par Antoine Fouchet (avec les historiennes Chantal Antier et Françoise Thébaud)

source http://www.la-croix.com/Actualite/France/Ces-femmes-au-service-de-la-France-en-14-18-2014-07-11-1177983#.U8BB2JRQGrw.facebook

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07/10/2014

L’apocalypse des «gueules cassées»

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La Grande Guerre, avec 20 millions de soldats blessés, a poussé la médecine à innover, de la prise en charge des patients à la chirurgie réparatrice et à la gestion du stress post-traumatique. Plongée dans les tranchées.
 
La Première Guerre mondiale, avec sa terrible «boucherie» dans les tranchées, ses gangréneux et ses amputés, ses nombreuses «gueules cassées» et ses grands brûlés, ses victimes des gaz chimiques, ses malades de la fièvre typhoïde ou de la grippe espagnole et ses névrosés victimes d’«obusite» aiguë, a posé des problèmes immenses aux services sanitaires des armées en présence, dès le début du conflit.

Confrontés à des traumatismes d’une ampleur inconnue jusque-là, les médecins militaires et civils ont vite été dépassés par le nombre inouï de blessés, victimes des obus, des balles ou des ravageurs shrapnels. «La Grande Guerre n’inaugure pas seulement le règne de la mort de masse, mais aussi celui de la blessure de masse», souligne l’historien Stéphane Audoin-Rouzeau, dans «1914-1918, la violence de guerre» (1).

Pour le président du Centre international de recherche de l’Historial de la Grande Guerre, à Péronne dans la Somme, le pire s’est produit au cours des premiers mois du conflit, quand le Service de santé des armées a été à la fois débordé par la masse immense de blessés, et entravé dans son action par sa propre sous-estimation des effets des projectiles modernes. En particulier «l’effet de souffle des balles, qui détruisait les structures musculaires, osseuses, vasculaires et nerveuses très au-delà de l’orifice du projectile».

En fait, en 1914, c’est toute la doctrine militaire sanitaire qui est dépassée. Car elle privilégie encore le transport des grands blessés vers les hôpitaux de l’arrière, les soins sur le terrain se limitant souvent à la pose d’un dérisoire bandage ou d’un pansement. Une pratique qui n’a quasiment pas changé depuis les grandes batailles de l’Empire, un siècle plus tôt, lorsque «le champ d’honneur était le champ d’horreur où les victimes agonisaient sans évacuation possible».

Le problème, c’est qu’avec la lenteur des transports, non prioritaires et mal organisés, les blessés vivent le calvaire. «Dans ce schéma directeur, les traumatisés du thorax et du ventre, qui n’ont pas péri sur place, décèdent pendant leur transport dans des circonstances effroyables», commente le chirurgien Raymond Reding, de l’Académie royale de médecine, dans un ouvrage sur l’«Hôpital de l’Océan» (2). Cet hôpital de campagne de la Croix-Rouge, installé dans un hôtel à La Panne en Belgique, fut l’un des premiers à être ouvert à proximité des combats, à douze kilomètres des lignes du front de l’Yser, pour pouvoir accueillir très rapidement les blessés. Précurseur dans l’usage de nouvelles techniques médicales et doté d’une logistique remarquable, il pouvait accueillir plus de mille patients.

L’enfer des tranchées
Au cours de la première année du conflit, les militaires tentent d’améliorer la prise en charge des blessés au front. Mais la guerre de position, qui succède à la guerre de mouvement, ne facilite pas l’action des brancardiers. Ces «dispensés de service militaire en temps de paix», à savoir principalement des prêtres, des séminaristes et des instituteurs, qui sont souvent mal formés et mal équipés, ont toutes les peines à se déplacer dans les étroites tranchées et les boyaux embourbés. Le transport des blessés sous la mitraille est long et périlleux jusqu’aux postes de secours, et les premiers soins plutôt rudimentaires, dans des conditions très difficiles.

«A la lueur vacillante d’une bougie fuligineuse, je coupe des vêtements, le sang coule sur mes mains. Je découvre des plaies monstrueuses au fond desquelles nagent des plaques graisseuses de moelle osseuse et de poussière d’os, et ces malheureux blessés aux figures jaunes de cire, aux nez effilés, aux traits crispés sur lesquels perlent des gouttes de sueur, me font penser aux martyrs», témoigne le médecin-major de 2e classe Léon Baros dans ses «Souvenirs de mobilisation et de dépôt» (Humblot, 1924), où il raconte ses interventions dans le tunnel de Tavannes, qui servait de quartier général et d’hôpital lors de la bataille de Verdun en 1916.

L’hygiène est aussi catastrophique, les règles de salubrité étant difficiles à respecter avec des millions de mouches volant partout, des rats qui amènent les puces et la gale, des cadavres abandonnés dans les cratères lunaires des zones de front. Dès le début du conflit, de nombreuses maladies infectieuses sévissent, notamment la fièvre typhoïde, qui fait 12 000 morts du côté français, mais est endiguée vers la fin 1915 grâce à la vaccination. Le paludisme cause aussi beaucoup de morts dans le camp des Alliés lors de l’expédition des Dardanelles.

Pas encore d’antibiotiques
Pour soigner plus efficacement les cas graves de blessures au visage, au thorax et à l’abdomen, des hôpitaux de campagne performants sont peu à peu ouverts à proximité du front. Les médecins développent des moyens de désinfection, dont la «liqueur de Dakin», incolore et non irritante, que le Prix Nobel de médecine et de physiologie Alexis Carrel va employer pour irriguer en continu les plaies ouvertes, afin d’éviter les gangrènes et de limiter les amputations. Les antibiotiques n’existent pas encore, mais dès 1916, une cinquantaine de laboratoires de bactériologie sont créés.

Chirurgie réparatrice
Les médecins se mettent aussi à utiliser des équipements radiologiques aux rayons X, conçus par Marie Curie, pour localiser les projectiles chez les blessés et extraire les corps étrangers sans toucher aux organes vitaux. L’anesthésie se généralise dès 1915, grâce au chloroforme, à l’éther puis au protoxyde d’azote développé par les Américains, ce qui facilite la chirurgie. La transfusion sanguine reste peu pratiquée jusqu’en 1917.

Les plus grandes avancées thérapeutiques ont lieu dans le domaine de la chirurgie réparatrice. Elles découlent en particulier de la multiplication des blessés de la face, la tête étant la partie du corps la plus exposée dans les tranchées. Pour soigner ces «gueules cassées», estimées entre 10 000 et 15 000 rien qu’en France et à des dizaines de milliers dans toute l’Europe, les médecins mettent au point des techniques prometteuses, comme les greffes osseuses et cartilagineuses ou les prothèses faciales.

Dans son livre-témoignage «Hommes sans Visage» (3), la Genevoise Henriette Rémi, alias Henriette Ith, née à La Chaux-de-Fonds, raconte avec émotion toute la misère et le courage de ces victimes défigurées, qu’elle a soignées comme infirmière bénévole dans un hôpital allemand, à Verden an der Aller, en Basse-Saxe.

Parlant d’un chirurgien spécialiste du nez, elle écrit: «C’est un as, un homme extraordinairement habile, qui greffe, qui pétrit, qui moule, enfin qui redonne quelque chose comme un nez à ceux qui n’en avaient plus - pour autant que la chose est possible, suivant l’état des chairs. J’ai vu de vraies merveilles sortir de sa main. Il a «réhumanisé» des monstres.» I

1 «1914-1918, la violence de guerre», Stéphane Audoin-Rouzeau, Editions Gallimard/Ministère de la défense-DMPA, 2014.
2 «L’Hôpital de l’Océan - La Panne 1914-1919», Raymond Reding, Editions Jourdan, 2014.
3 «Hommes sans Visage», Henriette Rémi, Editions Slatkine, 2014.

* * *

La situation dramatique des «morts vivants»
Les troubles nerveux et neurologiques sont très nombreux durant la Grande Guerre. Comme le souligne le documentaire «Apocalypse - La 1re Guerre mondiale» et le livre(1) de Daniel Costelle et Isabelle Clarke qui l’accompagne, 20 000 lits sont attribués à ce type de maladies en France pendant le conflit, soit 1/7 des disponibilités médicales. En Grande-Bretagne, 65 000 anciens combattants ont reçu une pension pour «neurasthénie».

En raison du bruit infernal des combats et des secousses incessantes des déflagrations des obus, nombre de poilus ont développé une «obusite» (ou «shell shock»), qui peut présenter des symptômes variés: surdi-mutité anéantissant le rapport au monde, tremblements persistants interdisant toute activité, camptocormie qui fait inexorablement se pencher en avant, états confusionnels ou amnésiques. La peur panique, la vision des corps déchiquetés ou le souvenir de ces atrocités peut aussi entraîner toutes sortes de névroses.

Pour faire face à cette «Folie au Front» (2), des centres improvisés de neuropsychiatrie sont installés à proximité du front. Après quelques semaines d’hospitalisation, les soldats sont renvoyés au combat, ou bénéficient d’une période de convalescence à domicile. Mais au vu de la gravité des cas, les médecins tentent de nouveaux traitements: hydrothérapie pour calmer l’excitation et l’anxiété, sommeil imposé aux combattants qui sont totalement épuisés, rééducation par la gymnastique, hypnose, anesthésie au chloroforme pour favoriser le retour de la parole et de l’ouïe, isolement pour éviter la «contagion».

Certains médecins, suspectant des simulations de soldats qui chercheraient à se soustraire à leur devoir patriotique, vont jusqu’à pratiquer des chocs électriques agressifs, «le torpillage», pour tenter de les confondre. Plusieurs patients, considérés comme des déserteurs, seront même fusillés.

Après le conflit, la majorité de ces «morts vivants» seront délaissés, sans soins ni pension d’invalidité. La Grande Guerre permettra en revanche aux spécialistes de prendre conscience de l’importance d’une prise en charge rapide des malades. Plus tôt les patients sont traités, meilleure est leur chance de guérison. Ce principe est toujours appliqué aujourd’hui dans la gestion du stress post-traumatique, dans les conflits armés, mais aussi dans le civil, lors d’attentats, de graves accidents ou de catastrophes.

1 «Apocalypse - La 1re Guerre mondiale», Editions Flammarion, 2014.
2 «La Folie au Front», Laurent Tatu et Julien Bogousslavsky, Editions Imago, 2012.
 
 
 
source :  PASCAL FLEURY http://www.laliberte.ch/news/histoire-vivante/l-apocalypse-des-gueules-cassees-249465#.VAI5KDJ_sfV