01/10/2017
Odette Roux, une vie de luttes et d'espoir
Première femme maire des Sables-d'Olonne de 1945 à 1947, Odette Roux fut de tous les combats du XXe siècle. Cette inlassable militante communiste s'est éteinte le 30 janvier 2014 à 96 ans.
En partenariat avec Chansons Rouges Mosaik Radio vous pourrez découvrir un document sur Odette Roux diffusé dans le magazine Histoire le jeudi 05 octobre à 15h, et le dimanche 08 octobre à 20h et sa biographie que vous pouvez écouter en podcast sur le site web de la radio}}}
C'était une rebelle, une batailleuse depuis toute petite. Odette Roux est née le 25 octobre 1917 à La Boissière-des-Landes, une commune vendéenne encore plus royaliste que le roi. Les parents de Dédée, comme on la surnomme, sont des laïcards purs et durs. Parce que La Boissière ne compte qu'une école privée de filles, ils l'inscrivent à l'école publique de garçons. Un scandale. La mère est excommuniée. Le père, artisan menuisier, perd tous ses clients. Elle aime tôt les livres mais à l'école, elle n'accepte déjà pas l'injustice, les « chouchous » de la bonne soeur, dont elle ne fait bien sûr jamais partie.
Odette poursuit ses études à l'École normale supérieure. Décroche à 19 ans son brevet d'institutrice. 1936 : le Front pop', les congés payés. Un « bouillonnement sans pareil » qu'elle évoquait régulièrement avec des brillants dans ses petits yeux marron clair : « On chantait. On campait. Le ministre de la Jeunesse était Léo Lagrange. Et moi, je voulais agir, lutter... », raconte-t-elle. Elle milite au Syndicat national des instituteurs. Tombe amoureuse d'Alfred, son futur mari, qui est communiste. Pour le retrouver chaque soir après la classe, elle parcourt Les Sables-d'Olonne-Bretignolles à vélo. 40 km le matin, autant le soir. Mais par esprit d'indépendance, elle refuse d'entrer, comme lui, au Parti communiste. « Je ne voulais pas qu'on dise que je le suivais... »
Maire ! Femme ! Communiste !
Janvier 1941. Odette Roux entre dans la Résistance avec son mari. Ils sont arrêtés en mars 1943. Alfred Roux meurt fin juin, épuisé par la torture et les interrogatoires. Odette en réchappe miraculeusement. Devenue Odette Petit dans la clandestinité, elle poursuivra la guerre seule avec sa fille, pédalant rageusement sur les routes de Vendée, les sacoches pleines de tracts, en évitant les patrouilles allemandes.
Dès la libération de la Vendée, en août 1944, les événements se précipitent : à la demande du préfet, elle intègre le conseil municipal des Sables-d'Olonne. La liste d'Union patriotique de la résistance antifasciste à laquelle elle participe, l'emporte. Il faut un maire. À 27 ans, elle s'y risque. Femme ! Communiste ! Elle en prend « plein la gueule », raconte-t-elle un jour à la journaliste Fanny Proust (1). Mais elle tient bon. Sur les murs de la ville, des affiches la diffament : « Derrière le sourire se cache le pillage, l'incendie, le crime, le viol... »
Pendant ces deux ans et demi de mandat, celle qui est devenue la première femme maire de France n'hésite pas à aller au charbon. Il y a fort à reconstruire aux Sables : jetée détruite, plage minée, rues obstruées. La ville se dote d'un centre médico-social, de cantines, de centres de loisirs. Elle aménage un jardin public sur la poussiéreuse Place d'armes dans le centre-ville. Un espace boisé que les gens appellent encore aujourd'hui le Jardin d'Odette.
Légion d'honneur
En 1947, elle perd son mandat mais n'abdique pas : jusqu'en 1973, elle sera candidate à chaque élection locale. Les défaites succèdent aux défaites. Elle dit avec humour « qu'elle a dû être la femme la plus battue de France ». Retraitée de l'Éducation nationale depuis 1972, elle a continué de militer sans arrêt pour les droits des femmes du monde. Ou au service du Secours populaire. Elle est restée fidèle jusqu'au bout au Parti communiste, rêvant encore, les jours derniers, d'une société où il n'y aurait « que des clochards par goût ». En janvier 2009, elle est nommée au grade de chevalier de l'ordre national de la Légion d'honneur. « Une distinction qui récompense votre engagement fidèle au service de la France, lui écrit Nicolas Sarkozy. Elle vient couronner votre dévouement et votre brillant parcours. »
Odette Roux est décédée jeudi soir dans sa 97e année. La cérémonie d'au revoir aura lieu au Crématorium Lemarchand à Olonne-sur-Mer, mercredi prochain à 10 h 30.
(1) Le jardin d'Odette, chronique d'une Vendéenne engagée, de Fanny Proust, éditions arts et Grains de mémoire, deux volumes (15 et 20 €).
16:06 Publié dans Biographie, Deuxième guerre mondiale, Occupation, Résistance | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : odette roux, résistante, sables d'ollones | |
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29/08/2017
Le destin de Lise et Artur London est indéfectiblement lié à l’histoire du 20ème siècle
Humanite.fr
Par Catherine Vieu-Charier, Adjointe à la Maire de Paris chargée des questions relatives à la mémoire et au monde combattant et Nicolas Bonnet Oulaldj, Président du groupe Communiste-Front de gauche au Conseil de Paris.

11:08 Publié dans Biographie, Libération, Occupation | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : lise london, biographie, paris | |
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23/07/2017
Pour Louis Antoine Saint-Just, le roi « doit régner ou mourir »
Olfa Ayed, L'Humanité
Les grands discours de la République (4/34). 13 novembre 1792 à la Convention nationale
L’unique but du comité fut de vous persuader que le roi devait être jugé en simple citoyen ; et moi, je dis que le roi doit être jugé en ennemi (…). Les mêmes hommes qui vont juger Louis ont une République à fonder : ceux qui attachent quelque importance au juste châtiment d’un roi ne fonderont jamais une République (…).
Nous nous jugeons tous avec sévérité, je dirais même avec fureur ; nous ne songeons qu’à modifier l’énergie du peuple et de la liberté, tandis qu’on accuse à peine l’ennemi commun et que tout le monde, ou rempli de faiblesse, ou engagé dans le crime, se regarde avant de frapper le premier coup. Nous cherchons la liberté, et nous nous rendons esclaves l’un de l’autre ! Nous cherchons la nature, et nous vivons armés comme des sauvages furieux ! Nous voulons la République, l’indépendance et l’unité, et nous nous divisons, et nous ménageons un tyran ! (…)
Pour moi, je ne vois point de milieu : cet homme doit régner ou mourir (…) il doit mourir pour assurer le repos du peuple, puisqu’il était dans ses vues d’accabler le peuple pour assurer le sien. L’on vous propose de le juger civilement, tandis que vous reconnaissez qu’il n’était pas citoyen, et qu’au lieu de conserver le peuple, il ne fit que sacrifier le peuple à lui-même (…).
On ne peut point régner innocemment : la folie en est trop évidente. Tout roi est un rebelle et un usurpateur. Les rois mêmes traitaient-ils autrement les prétendus usurpateurs de leur autorité ? Ne fit-on pas le procès à la mémoire de Cromwell ? Et, certes, Cromwell n’était pas plus usurpateur que Charles Ier, lorsqu’un peuple est assez lâche pour se laisser mener par des tyrans, la domination est le droit du premier venu, et n’est pas plus sacrée ni plus légitime sur la tête de l’un que sur celle de l’autre.
Citoyens, le tribunal qui doit juger Louis n’est point un tribunal judiciaire : c’est un conseil, c’est le peuple, c’est vous ; et les lois que nous avons à suivre sont celles du droit des gens (…).
Je ne perdrai jamais de vue que l’esprit avec lequel on jugera le roi sera le même que celui avec lequel on établira la République. La théorie de votre jugement sera celle de vos magistratures, et la mesure de votre philosophie, dans ce jugement, sera aussi la mesure de votre liberté dans la Constitution.
Je le répète, on ne peut point juger un roi selon les lois du pays, ou plutôt les lois de cité. Le rapporteur vous l’a bien dit ; mais cette idée est morte trop tôt dans son âme ; il en a perdu le fruit. Il n’y avait rien dans les lois de Numa pour juger Tarquin ; rien dans les lois d’Angleterre pour juger Charles Ier : on les jugea selon le droit des gens ; on repoussa la force par la force ; on repoussa un étranger, un ennemi. Voilà ce qui légitima ces expéditions, et non point de vaines formalités, qui n’ont pour principe que le consentement du citoyen, par le contrat. Tout ce que j’ai dit tend à vous prouver que Louis XVI doit être jugé comme un ennemi étranger. J’ajoute qu’il n’est pas nécessaire que son jugement à mort soit soumis à la sanction du peuple ; car le peuple peut bien imposer des lois par sa volonté, parce que ces lois importent à son bonheur ; mais le peuple même ne pouvant effacer le crime de la tyrannie, le droit des hommes contre la tyrannie est personnel ; et il n’est pas d’acte de la souveraineté qui puisse obliger véritablement un seul citoyen à lui pardonner (…).
Louis a combattu le peuple : il est vaincu. C’est un barbare, c’est un étranger prisonnier de guerre. Vous avez vu ses desseins perfides ; vous avez vu son armée ; le traître n’était pas le roi des Français, c’était le roi de quelques conjurés. Il faisait des levées secrètes de troupes, avait des magistrats particuliers ; il regardait les citoyens comme ses esclaves ; il avait proscrit secrètement tous les gens de bien et de courage. Il est le meurtrier de la Bastille, de Nancy, du Champ-de-Mars, de Tournai, des Tuileries. Il doit être jugé promptement. Peuple, si le roi est jamais absous, souviens-toi que nous ne serons plus dignes de ta confiance, et tu pourras nous accuser de perfidie.
Face aux 749 députés de la Convention nationale, le plus jeune élu de l’assemblée évoque la nécessité d’ouvrir le procès de Louis XVI, devant aboutir à son exécution pour en finir complètement avec la royauté.
Depuis le renversement de la monarchie le 10 août 1792 et la proclamation de la République le 21 septembre qui suivit, Louis XVI n’est plus roi de France. Dans ce discours emprunt de véhémence, le député de l’Aisne Louis Antoine Saint-Just profite de son manque de popularité pour se positionner comme le porte-parole du peuple trahis. En effet, ce Montagnard, proche de Robespierre, insiste sur les récentes erreurs de Louis XVI : il ne doit pas être jugé comme un citoyen mais comme l’« ennemi étranger » qui a créé une troupe de gardes suisses sans le consentement de l’Assemblée nationale.
Face à une confiance délitée du peuple envers le roi, sa simple incarcération semble inimaginable pour Saint-Just. Cette décision serait une menace pour la République et pour la liberté, estime l’élu qui insiste : le roi doit « régner ou mourir ».
Le discours du jeune député, pour qui la décision de la Convention reflétera le niveau de liberté qu’elle souhaite pour la République, aura un impact considérable pour la suite. Le procès de Louis XVI débute en décembre 1792. Sa tentative de fuite à Varennes, le 21 juin 1791, ainsi que l’utilisation des fonds publics pour financer la contre-révolution et la création d’une troupe de gardes étrangers, lui sont reprochés. Deux mois plus tard, le 21 janvier 1793, Louis XVI est guillotiné.
18:59 Publié dans Biographie, Révolution | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : saint just, discours | |
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